Mentor et prédécesseur du Suisse Joseph Blatter, Havelange a occupé la présidence de la Fifa (Fédération internationale de football) de 1974 à 1998. Cet ancien sportif au regard bleu d’acier et à la carrure imposante restera comme celui qui a fait de la Coupe du monde le plus grand événement sportif planétaire, la faisant passer de 16 à 32 équipes.
Sa mort à l’âge de 100 ans intervient alors que la Fifa est ébranlée par le plus grand scandale de corruption de son histoire, qui a contraint le fils spirituel de Havelange, Joseph Blatter, à démissionner de la présidence.
Né le 8 mai 1916 à Rio dans un milieu aisé, de parents belges qui avaient fui les horreurs de la Première Guerre mondiale, Jean-Marie (Joao) Faustin Godefroid Havelange devient en 1974 le premier non-européen à remporter la présidence de la Fifa. Durant sa campagne, il a promis à l’Asie et à l’Afrique d’y développer un sport jusqu’alors cantonné à l’Europe et l’Amérique latine.
Havelange a alors derrière lui une longue expérience du monde du sport. Comme sportif, il a participé aux JO-1936 de Berlin en natation et aux JO-1952 de Helsinki en water-polo, avant de devenir dirigeant : président de la Confédération brésilienne des sports (CBD) en 1958 puis membre du Comité international olympique (CIO) en 1963.
A son arrivée, la Fifa vivote et manque de ressources. Il esquisse un programme de développement et pour le mener à bien, recrute en 1975 Sepp Blatter, alors âgé de 39 ans.
C’est sous le mandat de Havelange que commencent à être signés des accords télévisés à prix d’or.
L’expansion de la Fifa en Afrique et en Asie a coïncidé avec le boom de la télévision et la « stratégie mondiale de marketing de Coca-Cola pour pénétrer de nouveaux marchés », explique l’universitaire canadien Trevor Slack dans son livre « la commercialisation du sport ».
Havelange « observe le monde au télescope et jamais au microscope », disait de lui Henri Kissinger, l’ancien secrétaire d’Etat américain.
Sous son leadership, la Fifa s’est aussi ouverte au football féminin et à la jeunesse, avec la création des Mondiaux féminins, -20 ans et -17 ans, ainsi que la Coupe des Confédérations.
Au cours de ses six mandats, il a souvent été reçu comme un chef d’Etat au gré de ses innombrables voyages (300 jours par an).
Il a aussi largement fait gonfler le nombre d’associations nationales membres de la Fifa (198 à son départ en 1998, 211 actuellement), pour cela surnommée « Les nations unies du football ». L’instance l’a même présenté au… prix Nobel de la Paix en 1988.
Mais l’histoire de Joao Havelange à la tête de la Fifa ne manque pas de zones d’ombre.
Il interdit au « roi » Pelé d’assister au tirage au sort de la phase finale du Mondial-1994 à Las Vegas. Le crime de « O Rei » ? Avoir osé accuser de corruption le gendre de Havelange, Ricardo Teixeira, alors président de la Confédération brésilienne (CBF). Teixeira fait partie des responsables du football inculpés par la justice américaine dans le scandale actuel qui ravage la Fifa.
Au fil des années, Havelange a lui-même été plusieurs fois soupçonné de corruption sans jamais être condamné.
En décembre 2011, il a démissionné de son poste au CIO – après 48 ans – afin d’éviter une sanction pour corruption dans une enquête sur ses liens avec l’ex-agence de marketing de la Fifa, International Sport Leisure (ISL), qui a fait faillite en 2011 avec des dettes de 300 millions de dollars.
Il a aussi été accusé d’avoir reçu un million de dollars pour qu’ISL conserve les droits de la Coupe du monde, selon un documentaire de la BBC.
De héros à paria : Havelange avait invité à son centenaire la famille olympique dès 2009, lorsque Rio de Janeiro avait obtenu l’organisation des JO-2016, mais il avait fêté ses cent ans en mai dans l’indifférence générale.
Il est décédé à l’hôpital Samaritano (Botafogo, zone sud de Rio). En juillet, il avait déjà été admis en soins en raison d’une pneumonie et ne sortait pratiquement plus de chez lui.
Lui qui avait joué un rôle clé dans l’attribution des JO 2016 à sa ville natale, ne verra pas la cérémonie de clôture.
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