Trip'Tic

Profession barlamani

“L’idéal, c’est quand on peut mourir pour ses idées. La politique, c’est quand on peut en vivre !”. Et encore, Charles Péguy, auteur de cette boutade bien inspirée, n’a pas vécu longtemps pour faire la connaissance des hommes politiques marocains. Prenez nos chers députés : alors que le pays patauge jusqu’au cou dans une crise budgétaire (qu’on cherche à minimiser), eux font pression pour obtenir plus d’avantages pécuniaires. Le président du parlement voulait instaurer un prélèvement sur la paie des élus qui s’absentent, il s’est retrouvé en train de concéder une augmentation de salaire, déguisée en nouvelles indemnités de logement et de transport. Et nul autre choix pour Karim Ghellab que de céder, au risque de choir du haut de son perchoir. Car nos parlementaires sont imbattables en marketing politique avec ses 4P de base : pouvoir, pognon, prestige et parlotte. Ils oublient souvent qu’ils ont eux-mêmes choisi de faire ce job : c’est eux qui sont allés solliciter les voix des citoyens pour représenter leurs intérêts. Là, ils agissent comme des rentiers avides de faire fructifier au maximum une grima de barlamani gagnée au loto des intikhabate. En plus, avec une indemnité de 36 000 dirhams par mois (de laquelle il faut prélever les cotisations sociales et les reversements au parti), nos élus n’ont pas à se plaindre : le revenu national brut par habitant chez nous ne dépasse pas les 27 000 dirhams. L’idéal aurait été donc d’indexer au moins une partie de leur revenu sur cette moyenne nationale, mais la politique veut que la fortune des dirigeants ne soit pas corrélée à celle du peuple, mais qu’elle se fasse plutôt sur le dos du peuple.

 

Secrets de l’Intérieur

Restons avec les parlementaires, mais sur un autre registre. En quoi excelle un député ? Réponse : à pousser à bout un ministre. C’était le cas cette semaine, quand Mohand Laenser, confronté à l’épreuve des questions orales des députés, a fini par craquer. “Non, je ne dévoilerai pas les noms des bénéficiaires des agréments de taxi”, avait-il lancé avant de partir en tête à queue. “Est-ce qu’on peut demander à une banque de dévoiler les relevés de ses clients ?”. Notre ministre de l’Intérieur a beau se rattraper en soulignant que le grand déballage des agréments de taxi aura lieu en même temps qu’une proposition de réforme de tout le système, mais le mal est déjà fait. Sa frasque sera retenue pour le bêtisier de l’année. Car comparer les grimate au secret bancaire, c’est un peu fort de harira. Même si on vit dans le paradis de la rente, notre dakhilia ne peut être mise sur le même pied d’égalité qu’une banque du Liechtenstein. A moins de nous révéler que les walis et gouverneurs qui distribuent ce genre de grimate touchent des commissions sur ces transactions…

 

Al Aoula, bonne dernière

C’est un peu comme une mauvaise sitcom qui revient tous les ramadan. Al Aoula a de nouveau perdu de l’audience. Les premiers chiffres de Marocmétrie révèlent que la chaîne de Dar El Brihi tombe à moins de 10% de parts de marché durant l’heure du ftour, soit le prime time du ramadan, réputé être la haute saison audiovisuelle pour nos chaînes locales. Sous d’autres cieux, tout directeur de programmes de toute chaîne qui se respecte aurait fait ses cartons avant même que ce chiffre ne soit rendu public. Et même le directeur général aurait sérieusement envisagé de présenter sa démission. Mais pas chez nous. Aucun dirigeant n’est mis devant ses responsabilités, pas un seul gros bonnet de l’audiovisuel public n’a sauté, alors qu’on assiste depuis cinq ans à la descente aux enfers d’Al Aoula. Quand est-ce que viendra le changement ? Quand les audiences vireront au négatif ? C’est tout simplement impossible. Reste alors à espérer que ces responsables commettent l’irréparable, comme par exemple foirer le direct d’une couverture des activités royales, ou oublier dans le conducteur du JT une activité princière. Sinon, on peut toujours espérer une recette miracle, via les nouveaux cahiers des charges sur lesquels se penche Nabil Benabdallah, ministre de l’Habitat. Entre la gestion de deux effondrements à la médina, peut-être qu’une idée de génie lui tombera du ciel pour relancer Al Aoula. En principe, il n’a plus que quelques semaines pour présenter la version définitive de ces cahiers des charges. Alors rendez-vous en septembre, et d’ici là bonnes vacances !

Rejoignez la communauté TelQuel
Vous devez être enregistré pour commenter. Si vous avez un compte, identifiez-vous

Si vous n'avez pas de compte, cliquez ici pour le créer