Etude. Les clés de bagnole

Quelle voiture les Marocains préfèrent-ils ? Combien sont-ils prêts à payer pour se l’offrir ? Avec quels moyens ? Une récente enquête, réalisée par les professionnels du secteur, dresse le portrait-robot des automobilistes du royaume. Edifiant.

S’il y a un secteur qui ne connaît pas la crise et continue de croître contre vents et marées, c’est bien celui de l’automobile. Marqueur social, outil de travail ou simple plaisir de la vie, la voiture est devenue l’accessoire incontournable du Marocain des années 2000. A fin 2012, le parc de voitures circulant dans le royaume avoisine les 3 millions, tous types de véhicules confondus, contre à peine 1,9 million il y a tout juste dix ans. Une croissance folle qui se voit aussi au niveau des ventes, dont le rythme est passé de 42 227 unités vendues en 2000 à plus de 120 000 unités en 2012. Chaque année, ce sont ainsi plus de 120 000 caisses neuves qui s’ajoutent au flux de la circulation sur les routes marocaines. Un chiffre record, qui est encore appelé à croître puisqu’aujourd’hui seul un tiers des foyers marocains dispose d’une voiture. Il y a donc encore à boire et à manger pour les concessionnaires locaux… Mais qui achète ces voitures ? Combien les Marocains sont-ils prêts à payer pour s’offrir leurs compagnes à quatre roues ? Avec quels moyens ? Et quelles sont leurs préférences ? Une récente étude de l’Association des importateurs de véhicules automobiles au Maroc (Aivam), réalisée par le cabinet international Nielsen sur un échantillon de 2500 personnes de 15 régions différentes, vient d’apporter quelques éléments de réponses. Le résultat est très instructif, parfois même surprenant. En voici un  condensé. Vroum…

 

Trente ans, sinon rien !

Les Marocains achètent généralement leur première voiture entre 30 et 35 ans. C’est ce qu’affirment 78% des sondés. Un âge assez élevé, en comparaison avec la moyenne européenne qui se situe entre 20 et 30 ans. La raison de ce retard ? En premier lieu, incontestablement, l’argent. Un Marocain sur trois évoque en effet le manque de moyens financiers pour justifier le fait qu’il ne possède pas de voiture ou qu’il ne compte pas en acheter une dans l’immédiat. Normal quand on prend en compte cet autre indicateur qu’est le rapport entre le prix de la voiture neuve la moins coûteuse et le salaire minimum en vigueur. Au Maroc, ce rapport avoisine les 25 mois de salaire, alors qu’il est trois fois inférieur dans des pays comme la France ou encore l’Espagne.

 

Une histoire d’hommes

On se doutait un peu que l’automobile était une affaire de “mâles”. Et le moins qu’on puisse dire, c’est que l’un des résultats de cette enquête vient le confirmer de manière formelle, donnant de quoi alimenter un nouveau chapitre dans le discours des associations féministes. Ainsi, sur un échantillon aléatoire composé de 1800 personnes, et dont l’unique caractéristique est de posséder une voiture, une proportion de 79% appartient au sexe masculin. Une telle répartition entre les deux genres renvoie à une réalité de la société marocaine : la règle usuelle est qu’au sein d’un ménage ne disposant que d’un seul véhicule, c’est presque invariablement l’homme qui en a la propriété officielle et l’usage principal.

Ce “machisme” se ressent aussi au niveau de la prescription. Si la femme demande d’abord conseil à son mari (40% des cas) avant de passer à l’acte, les hommes, se considérant comme des “experts”, font d’abord confiance à… eux-mêmes pour le choix de leur véhicule (54% des réponses). Pour avoir confirmation de  “l’excellence” de leur choix, ils solliciteront ensuite l’aide de leurs amis (25% des interrogés) et de leurs parents (16% des sondés). Et ce n’est qu’une fois l’arbitrage fait, que le mâle pensera à en informer sa douce moitié, citée dans seulement 9% des réponses.

 

Le juste prix

Combien les Marocains sont-ils prêts à payer pour leur première voiture ? Tout dépend bien sûr de leur revenu. En moyenne, le budget consacré par un Marocain à l’achat d’une auto neuve se situe majoritairement entre 100 et 200 000 DH, tranche de prix citée par 68% des sondés. La pondération de l’ensemble des personnes sondées permet de dégager un prix moyen qui avoisine les 160 000 DH. Pour les véhicules de seconde main, la fourchette se situe entre 50 et 100 000 DH, une tranche de prix citée par 90% des acheteurs. Une conclusion plus ou moins confirmée par la physionomie du marché, inondé par les mini citadines (Kia Picanto, Hyundai I10, Citroën C1), les citadines polyvalentes (Ford Fiesta, Renault Clio ou Peugeot 206) ou encore Dacia, devenue depuis son entrée en scène la star incontournable de sa catégorie.

 

Le crédit, un passage obligé ?

Le financement de l’achat d’une voiture se fait majoritairement par le biais d’un crédit. Ainsi, une proportion de 61% des sondés affirme avoir contracté un emprunt pour le faire, alors que les 39% restants déclarent avoir recouru à leur bas de laine. Toutefois, cette répartition ne concerne, à en croire les résultats de l’étude, que le premier achat, qu’il soit neuf ou d’occasion. Car pour les achats de renouvellement, les proportions sont pratiquement inversées. Le paiement “au comptant” représente dans ce cas 68 % des modes de financement, alors que le crédit ne concerne plus que 32 % des acquisitions. Un tel bouleversement dans le mode de financement est plutôt étonnant. Il supposerait que l’achat de renouvellement soit souvent le corollaire d’une sensible augmentation des revenus de l’automobiliste, occasionnant une épargne conséquente à laquelle viendrait s’additionner le fruit de la revente de son précédent véhicule.

 

Mazout forever

C’est tout sauf un scoop : l’automobiliste marocain ne jure que par le diesel. Ce carburant représente en effet 73% du marché automobile, toutes catégories et usages confondus. L’essence ne domine finalement que le segment des mini-citadines… simplement parce que les motorisations diesel n’y sont quasiment pas proposées. Et la tendance à la diésélisation ne fait que se confirmer, puisque la proportion du moteur à gazole est de 75% pour les ventes de voitures neuves, contre 72% sur le marché de l’occasion, où l’essence a l’avantage d’afficher des prix plus accessibles. Les raisons de ce tropisme sont bien connues : un prix à la pompe inférieur à celui du sans-plomb et des consommations réduites, conjugués à une plus faible décote à la revente. Tel le village gaulois d’Astérix, l’unique région à résister au diktat du mazout est celle de l’Oriental. Ainsi, 67% des voitures vendues à Oujda sont équipées de moteurs essence. Merci la contrebande !

 

Podium. Dans ma Benz, Benz, Benz…

Pour le choix de leur voiture, les Marocains prennent pour critère un curieux mélange de passion et de raison. On pourrait penser que, dans un marché comme le nôtre, le premier critère cité par les automobilistes serait le prix. Il n’en est rien, celui-ci n’est mentionné parmi les priorités que par 63% des sondés, se plaçant en troisième position derrière la motorisation. C’est finalement un élément beaucoup moins terre-à-terre qui trône en tête des facteurs de choix : la marque du véhicule, citée par 85% des personnes interrogées ! C’est dire l’importance que revêt pour les automobilistes du royaume le logo apposé sur la calandre. Et même s’ils ne mettent pas le paquet pour acheter leurs voitures, les Marocains, super-rêveurs, préfèrent plutôt des marques premium. And the winner is… Mercedes, citée spontanément dans 82% des réponses. Une donnée qui confirme la forte image dont jouit le constructeur allemand sur le marché local. Quant à Renault, elle se place en deuxième position des marques préférées des Marocains, talonnée de près par l’autre Française, Peugeot.

 

Tableau de bord

3 millions de voitures circulent au Maroc

1 foyer sur trois possède un véhicule

79% des automobilistes sont des hommes

35 ans, c’est l’âge moyen d’achat d’une voiture

31% des véhicules en circulation sont des voitures neuves

160 000 DH, c’est le budget moyen d’achat d’une voiture neuve

73% du parc auto sont des véhicules diesel

 

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