Le changement est imminent à la Bourse de Casablanca. Une refonte de loi est déjà prête, avec des nouveautés très attendues par les professionnels du secteur. Décryptage.
Depuis le temps qu’on nous en parle, la réforme de la loi relative à la Bourse des valeurs de Casablanca (BVC) vient finalement de tomber. Le gouvernement Benkirane l’a déposée sur le site du secrétariat général du gouvernement, pour consultation, avant qu’elle ne passe par le circuit habituel. Pour plusieurs observateurs, il était grand temps que cette réforme voie le jour car elle a pris beaucoup de retard. D’autant que la BVC n’a connu, depuis sa création en 1929, que deux réformes. On remarque d’ores et déjà que le projet de loi fait référence à l’Autorité marocaine du marché des capitaux (AMMC) en substitution du CDVM. « Nous n’attendons plus que les textes d’application pour que la réforme entre pleinement en vigueur. La nouvelle loi renforce l’indépendance de l’autorité et élargit de manière formelle le champ de la régulation à l’ensemble du marché des capitaux », explique Hassan Boulaknadel, directeur général du CDVM. Autre fait marquant de ce texte tant attendu, la BVC se dirige vers une autonomie en termes de réglementation, afin de promouvoir plus de flexibilité et d’innovation. Autrement dit, la société gestionnaire de la Bourse aura un règlement général lui permettant des évolutions régulières. Elle pourra à terme créer autant de compartiments que nécessaires tout en respectant les réglementations du CDVM. Selon Hassan Boulaknadal, « notre place financière disposera ainsi des mécanismes nécessaires pour gérer de manière proactive les évolutions d’un marché financier en perpétuelle mutation ». La nouvelle loi a aussi pour objectif de renforcer le rôle de la Bourse dans le financement de l’économie et en particulier les PME.
Cependant, on peut se demander si cette réforme permettra au marché de sortir de sa léthargie, surtout que celui-ci a également souffert d’une hémorragie de radiations et d’une pénurie d’introductions, causant une absence de liquidités et un tassement des transactions. Cette réforme réussira-t-elle à inverser la situation ? Une question à laquelle les experts ne peuvent pas encore répondre de manière tranchée.
Enfin un marché alternatif
Et pour cause, la loi prévoit que la cote casablancaise soit scindée en deux : en plus du marché principal, cette réforme prévoit la création d’un autre alternatif. Un nouveau marché attendu, où seront cotées les petites et moyennes capitalisations. Le but étant de permettre aux PME un accès plus fluide à la cote, car les conditions d’introduction et de séjour seront plus souples. La Bourse casablancaise s’alignera donc sur les standards internationaux en créant cette structure parallèle. Une mesure qui pourrait redonner confiance aux émetteurs.
Reste à savoir si les PME marocaines sont prêtes à accepter la transparence du marché boursier. Des dispositions ont également été prévues pour augmenter le niveau des volumes traités et drainer plus de liquidités. Cela concerne le compartiment de la négociation des fonds collectifs, qui n’a connu aucune cotation depuis sa création. La loi prévoit dans ce sens de renforcer son attrait, en introduisant de nouveaux produits tels que les fonds indexés, Exchange Traded Funds (ETF), et les fonds immobiliers. « Pour être au rendez-vous de l’internationalisation de notre marché des capitaux, nous devons le doter d’une gamme de produits financiers élargie afin de susciter l’intérêt des investisseurs aussi bien nationaux qu’internationaux », souligne Hassan Boulaknadel.
On se prépare pour le CFC
Un travail que tente de faire tant bien que mal le management de Casablanca Finance City en multipliant les road-shows pour séduire les entreprises étrangères et les inciter à s’installer dans le hub que le Maroc met peu à peu en place. Celles-ci étaient jusqu’ici interdites de la cote casablancaise, à l’exception d’Ennakl qui a bénéficié d’une dérogation spéciale. Le nouveau texte veut corriger la situation en leur ouvrant la voie vers l’introduction à la BVC, qu’elles soient installées au Maroc ou non. Afin d’attirer plus d’introductions, les procédures ont été simplifiées. L’émetteur étranger pourra donc choisir entre une cotation en dirhams ou en devises. Encore faut-il que ces entreprises internationales veuillent bien d’une introduction.
Le projet de loi introduit également la notion de conseillers en investissement. C’est-à-dire ces entreprises qui exercent l’activité de conseil en faveur d’une société donnée tout au long de son séjour à la cote. Et dans une logique d’enchaînement, la réforme prévoit aussi des organismes spécialisés pour les PME. Sachant que, jusqu’à présent, aucun texte ne régissait ces entités. Une disposition qui permettra donc de combler un vide. L’AMMC héritera du rôle de régulateur et devra leur octroyer les agréments nécessaires. « L’Autorité du marché va définir le cadre réglementaire dans lequel devront évoluer lesdites personnes morales et s’assurer du respect des aspects déontologiques et organisationnels propres à ces acteurs », explique Hassan Boulaknadel. Les 17 sociétés de Bourse (SDB) sont, elles aussi, concernées par cette mesure, et verront donc leur champ d’action s’élargir après la réforme. Outre les activités classiques d’exécution de transactions boursières, les SDB pourront conseiller leurs clients. Des services d’ingénierie financière et de gestion de patrimoine s’ajouteront à leurs offres.
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