Quand l’Espagne mettait sur écoute des responsables marocains

Pendant 7 ans, les services secrets espagnols ont épié les conversations de personnalités marocaines via un virus implanté dans leurs appareils mobiles et ordinateurs. La découverte du virus par Kaspersky a mis fin à l'opération.

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Smartphone observé par des caméras de sécurité
Crédit: DR

Le Maroc a été espionné par les services secrets espagnols entre  2007 à 2014. C’est ce qu’a révélé au quotidien espagnol El Mundo David. R Vidal, un ancien agent qui a été pendant plus d’une décennie un collaborateur du« Centro Nacional de Inteligencia » (le service de renseignement et de contre-espionnage espagnol) en Afrique du Nord.

L’ancien agent des services secrets espagnols, qui dirige aujourd’hui le cabinet de conseil Global Chase,  a affirmé au journaliste Ignacio Cembrero avoir reçu en 2005  l’ordre de sa hiérarchie de se procurer les numéros des mobiles personnels de centaines de personnalités marocaines importantes. Il affirme n’avoir pas voulu en connaître les raisons mais soupçonnait le centre d’avoir acheté, loué ou développé un système qui interceptait des appels et des données de téléphonie mobile.

Il  précise que cette opération concernait principalement au départ l’immigration clandestine vers l’Espagne en indiquant qu’il détenait déjà les numéros de certains membres des forces de sécurité marocaines, ce qui leur a permis de développer leur « carnet d’adresses ». « Si vous connaissez le numéro de téléphone d’un commissaire, il finira par parler au directeur général de la police qui à son tour contactera avec le ministre, et ainsi de suite….», a expliqué l’ancien espion.

Un virus découvert par la société russe Kasperky

Un an après qu’il ait reçu cet ordre, des centaines de téléphones mobiles marocains et d’ordinateurs de l’administration marocaine ont été infectés par un nouveau cheval de Troie baptisé « Careto», dont, relève l’article d’El Mundo, « certains codes ont été écrits dans un espagnol très pur ». Un cheval de Troie est un type de logiciel malveillant qui introduit un parasite ou virus dans l’appareil hôte. Selon les confidences de David. R Vidal, l’Espagne avait également utilisé « Careto » au Brésil et dans les pays étrangers où  les entreprises espagnoles sont présentes. Mais le Maroc a été le pays le plus visé, avec plus de 383 adresses IP infectées, ce qui a correspond à 42% des mobiles et ordinateurs espionnés.

Cependant, « Careto » a finalement été découvert suite à une erreur de manipulation vers la fin de l’année 2013. Selon Sergio de Los Santos, directeur du Laboratoire Eleven Path, la société de cybersécurité de la multinationale espagnole Telefónica, « les personnes qui l’ont utilisé ont essayé de manipuler une version obsolète d’un antivirus de la société russe » Kaspersky Lab, ce qui a attiré l’attention de la société parce qu’ils auraient dû le faire avec une version mise à jour. Et en février 2014  l’entreprise russe Kaspersky Lab annonçait avoir découvert un virus informatique nommé « Careto » développé dans un pays hispanophone, qui sévissait sur la toile depuis 2007 et dont le Maroc était la principale victime. Après l’annonce de la découverte, le virus a été désactivé dans tous les appareils où il avait été introduit, indique David R. Vidal.

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