MWC 2016: Ford n'est plus (seulement) constructeur automobile

Ford n'est plus seulement un constructeur de voitures, mais aussi une entreprise high-tech. La marque mythique accélère sa mutation et veut passer de l'automobile au mobile, puis à la voiture sans chauffeur dans quatre ans.

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Design racée et ligne épurée, la Kuga est la plus connectée des voitures Ford. Crédit: Ford

Concurrencés par les géants de la high-tech qui marchent désormais sur leurs plate-bandes, les grands constructeurs automobiles entament leur mue, en misant de plus en plus sur la mobilité, et bientôt sur les voitures sans chauffeur.

Le constructeur américain Ford est un des précurseurs en la matière. Lors du Mobile World Congress 2016 (MWC), la plus grande messe mondiale des technologies mobiles qui se déroule à Barcelone jusqu’au jeudi 25 février, Ford a installé un grand stand au milieu de ceux des mastodontes du mobile Samsung et LG, et a présenté  sa nouvelle vision basée sur l’intégration des technologies mobiles.

« Cette année, Ford est une compagnie automobile, mais devient aussi une entreprise mobile », a annoncé Mark Fields, le PDG de la firme, qui espère « redéfinir le futur des transports comme Henry Ford, le fondateur, avait fait il y a une centaine d’années ».

« Il y a un milliard de voitures aujourd’hui, et dans 30 ans, si la même cadence se poursuit, un autre milliard s’y ajoutera…. Mais il n’y a pas suffisamment d’espace sur terre pour cet autre milliard », nous affirme pour sa part Don Butler , directeur exécutif  chez Ford, en charge des voitures et services connectés. Radical.

Il n’y aurait donc plus d’ « espace » dans le futur pour contenir  toutes ces voitures, mais aussi (et surtout) il existe aujourd’hui davantage de concurrence dans le secteur automobile.  Des géants de la High tech à l’image de Google investissent désormais dans ce secteur et une profonde transformation des habitudes des consommateurs s’opère. Les « millenials », ces jeunes nés en plein boom technologique, « ne pensent pas à acheter une voiture. Ils en veulent une uniquement quand ils en ont besoin », enchaîne Butler.

Résultat : Ford passe de fabricant de « hardware », c’est-à-dire de pièces mécaniques, à celui de développeur de software, en l’occurrence de tout un tas de solutions pour la mobilité.

A l’heure actuelle, 90% de la valeur de la voiture provient de ses pièces mécaniques, mais dans dix ans, cela ne va plus représenter que 40%, tandis que les 60%  autres proviendront de l’électronique. Il faut aussi savoir que les derniers modèles, comme la Ford Kuga qui trône au milieu du stand du fabricant américain, embarque dix fois plus de code informatique dans ses entrailles qu’un Boeing 767.

Design racée et ligne épurée, la Kuga est la plus connectée des voitures Ford. Crédit: Ford
Design racé et lignes épurées, la Kuga est la plus connectée des voitures Ford. Crédit: Ford

Ford a donc appuyé sur le champignon pour rester en bonne position dans la course. Le constructeur a annoncé lors du MWC la mise à jour de sa plateforme Ford Sync 3. Déjà présenté au CES de Las Vegas.  Nous avons pu tester le système qui offre un écran plus large (8 pouces), capacitif, ce qui le rapproche du confort du smartphone. Sync 3 est désormais compatible avec Apple CarPlay et Android auto, tout en renforçant  Applink, la solution maison pour une comptabilité instantanée avec plusieurs applis (une bonne vingtaine pour l’Europe, et une centaine dans le monde à terme). Il suffit de connecter son téléphone pour disposer des applis les plus utiles comme Accuweather pour la météo, la navigation, la musique, etc.

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(c) Ford

Le système offre aussi des commandes vocales améliorées par rapport aux anciennes versions de Sync, et il suffira désormais de demander à sa voiture « où prendre un café ?  », pour que l’ordinateur de bord interprète la demande et affiche les meilleurs endroits aux alentours. Autre petit plus : il est aussi possible de démarrer facilement une playliste sur Spotify, sans avoir à toucher l’écran. la solution arrive sur les marchés européens dès ce premier trimestre 2016, et va s’étendre au reste du monde, dont la zone Mena, au plus tard fin 2017, annonce la marque.

Le smartphone prend le volant

Un des partenariats particulièrement mis en avant par Ford, et qui illustre la transformation de business model affichée par le fabricant, est celui avec Fretbay, développeur de MyBoxMan.

MyBoxMan. Crédit: Ford
MyBoxMan. Crédit: Ford

C’est, pour faire simple, un Airbnb pour la livraison de colis. Au lieu d’avoir recours à un service spécialisé (et donc cher), il suffit d’utiliser l’appli pour repérer des conducteurs prêts à s’acquitter de la mission. « On ne dépend plus d’une fourchette horaire de livraison : on sait à quelle heure, tout en suivant avec précision le trajet de son colis », nous explique Areeba Rehman, fondatrice de Fretbay, une start-up française.

Ce genre de partenariats, c’est ce vers quoi s’oriente la marque centenaire, qui imagine déjà une solution globale de transport dans laquelle conduire n’est qu’une option parmi d’autres. Ford mobility veut concevoir des solutions allant du covoiturage, au parking, en passant par les pass d’utilisation de vélos ou encore des transports en commun.

Le permis aux oubliettes… ou presque

Ces évolutions nous amènent tout naturellement à la révolution ultime : la voiture sans chauffeur. Si Google est l’entreprise qui se positionne le plus sur ce créneau, Ford nous annonce avoir terminé la phase de recherche et commencer celle de l’ingénierie.

« Nous prenons la chose très sérieusement, et nous avons un programme de recherche en ingénierie très développé en la matière (…) Nous pensons qu’il sera tout à fait, possible d’avoir une voiture complètement autonome d’ici 4 ans », nous affirme Ken Washington, vice-président en charge de la recherche et des technologies de pointe, qui nous révèle que Ford avait déjà entamé des recherches sur la question  il y a dix ans, en s’adonnant à des recherches financées par la Darpa, l’agence américaine pour la défense,  sous un nom de code.

L’avenir se présenterait ainsi : un segment de voiture de luxe où conduire sera un plaisir optionnel, et un autre, de masse, ou les voitures circuleront en flotte. Mais avant d’en arriver à ce rêve de tous les auteurs de science-fiction, la compagnie se heurte à plusieurs difficultés, à commencer par les prix encore élevés de ces technos, et également à des soucis liées aux capteurs,

« Comment on distingue par exemple une personne qui vous fait un signe de la main et un policier qui vous demande de vous arrêter ? « , schématise Ken Washington, convaincu toutefois de l’arrivée imminente de cette technologie chez Ford.

(De notre envoyé spécial au MWC à Barcelone)

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