Le roi de Thaïlande, Bhumibol Adulyadej, est mort

Le roi de Thaïlande Bhumibol Adulyadej est mort ce 13 octobre, à l'âge de 88 ans. Le pays a décrété un an de deuil national.

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Bhumibol Adulyadej - crédit : AFP

Le roi de Thaïlande Bhumibol Adulyadej, doyen des monarques en exercice, avait acquis en 70 ans de règne une stature de « père de la nation », fruit de décennies de culte de la personnalité, protégé par une loi de lèse-majesté très répressive.

Ses portraits dans des cadres dorés ornaient routes et rues du pays, le montrant à tout âge, jeune homme passionné de photographie, un appareil autour du cou ou rendant visite à des paysans dans la force de l’âge.

Sa photographie était affichée dans les échoppes, les foyers, les écoles… Les enfants y suivent depuis des dizaines d’années un enseignement spécialement dédié à l’histoire de la famille royale, empreinte de respect et de dévotion.

Critiquée il y a quelques années, notamment par des universitaires, la rigueur de la loi de lèse-majesté (puni de 15 ans de prison) entraînait une forte autocensure sur le sujet, notamment dans les médias. Et ce qui se passait derrière les murs du palais restait inabordable.

Ce tabou autour du roi s’était fortement renforcé depuis le coup d’Etat du 22 mai 2014. Celui-ci avait été mené, une fois de plus, par des militaires royalistes mettant en avant la nécessaire défense de la monarchie.

Le roi voyait l’armée « comme un partenariat pour développer le pays », explique Paul Handley, auteur de la biographie interdite « The king nevers smiles », aujourd’hui journaliste de l’AFP.

Le 25 août 2014, le roi avait approuvé dans ses fonctions le Premier ministre le général Prayut Chan-O-Cha, meneur du coup, étape symbolique crucial de légitimation du pouvoir des militaires.

Depuis des décennies, dans tous les cinémas du pays, la foule se levait (sous peine de poursuites) quand retentissait l’hymne royal, accompagné d’un clip montrant les bienfaits réalisés sous la houlette du roi, passionné par les projets agricoles, notamment les lacs artificiels.

Bhumibol était présenté comme le père de la nation, voire un demi-dieu, dans cette société profondément divisée entre élites traditionnelles royalistes et masses séduites par la politique sociale développée par le politicien milliardaire Thaksin Shinawatra.

Celui-ci a été renversé par un coup d’Etat en 2006, ce qui n’a pas empêché ses formations de remporter toutes les élections nationales depuis.

Au grand dam du roi, exaspéré par Thaksin Shinawatra depuis sa première victoire aux législatives de 2001 selon les analystes. Le roi avait condamné en 2006 les élections « non démocratiques » organisées à la hâte par le puissant homme d’affaires.
Fin stratège politique malgré son absence de pouvoir constitutionnel (depuis l’abolition de la monarchie absolue en 1932), Bhumibol avait réussi à réaffirmer la monarchie et à s’imposer comme une figure tutellaire irremplaçable.

Cette image prend en partie sa source dans son intervention lors du soulèvement populaire de mai 1992, quand il avait exhorté, devant les caméras de télévision, les chefs des deux camps, accroupis à ses pieds en signe d’allégeance, à faire la paix.

Bhumibol, de plus en plus affaibli, n’intervenait que rarement ces dernières années, pour appeler à l’unité nationale.

Parmi les sujets tabous: sa fortune colossale. En 2011, Forbes le classait plus riche monarque au monde. Autre tabou: la mort mystérieuse par balle de son frère aîné, le roi Ananda Mahidol, au palais en 1946.

Bhumibol devient alors le roi Rama IX, neuvième monarque de la dynastie des Chakri. Sept ans avant Elizabeth II d’Angleterre, en faisant le plus ancien monarque en exercice.

Entre 1946 et 1950, celui qui s’était soudain vu propulser sur le devant de la scène était rentré finir ses études en Suisse, pays où il a passé une grande partie de sa jeunesse, après sa naissance le 5 décembre 1927 aux Etats-Unis.

Il n’avait eu de cesse depuis de bâtir son image de sage, protecteur de la nation et investi de la mission d’améliorer la vie de son peuple, s’imposant comme le dénominateur commun d’un pays qui a connu sous son règne 19 coups d’Etat ou tentatives.

Signe de son pouvoir, il avait fêté en juin 2006 le 60e anniversaire de son accession au trône devant un million de personnes et des dizaines de rois et reines.

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