Un 28e sommet arabe plus ouvert, mais...

Pour la première fois, le Sommet de la Ligue arabe convie des intervenants européens à participer aux débats qui se tiendront les 29 et 30 mars. Mohammed VI y fait aussi son come-back.

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Comité préparatoire au 28e sommet de la Ligue arabe. Crédit: AFP

Le 28e sommet arabe se tiendra les 29 et 30 mars à Amman, la capitale jordanienne. Après douze années d’absence, le roi Mohammed VI sera présent à cet événement qui convie pour la première fois des personnalités européennes et onusiennes, notamment le secrétaire général des Nations Unies.

La tenue de ce sommet suscite de grandes attentes, contrairement à la précédente édition. En effet, la dernière édition avait eu lieu le 25 juillet 2016 à Nouakchott. Seuls six chefs d’État étaient présents. Le Maroc, qui devait initialement abriter le sommet, avait renoncé à l’accueillir puis à y participer, estimant que les conditions pour en garantir le succès n’étaient pas réunies.

« Au regard des défis auxquels fait face le monde arabe aujourd’hui, le sommet arabe ne peut être une fin en soi ou devenir une simple réunion de circonstance. Les conditions objectives pour garantir le succès d’un sommet arabe, à même de prendre des décisions à la hauteur de la situation et des aspirations des peuples arabes, ne sont pas réunies« , soulignait le communiqué des autorités marocaines, craignant que le manque d’unité et de solidarité dans le monde arabe constitue un handicap majeur.

Avec Guterres, sans Assad ni Bouteflika

Qu’est-ce qui a changé cette année, pour que le Maroc, et d’autres pays décident finalement de prendre part au Sommet? Tout d’abord, le fait que la liste des participants ne se limite pas aux chefs d’État arabes. Cette fois-ci, le Sommet convie les dirigeants de différentes organisations internationales comme l’ONU (son secrétaire général, Antonio Gutterres sera présent), l’Union européenne (représentée par Federica Mogherini, haute représentante de l’Union pour les affaires étrangères), l’Union africaine (Moussa Faki, président de la Commission de l’UA), le Parlement arabe (par le biais de son président, Mechaal Esselmi), ainsi que l’Organisation de la Coopération islamique (via son président Youssef El Otheimine).

Si le sommet s’ouvre à de nouveaux partenaires, un acteur phare est absent encore une fois cette année. Il s’agit de Bachar Al Assad. Le président syrien avait vu l’adhésion de son pays suspendue, depuis le début de la guerre civile. D’autres chefs d’État ne feront pas le déplacement, à commencer par Abdelaziz Bouteflika. Le sultan d’Oman, le président irakien, le président des Emirats Arabes Unis seront également absents et représentés par des émissaires.

Un Sommet sans langue de bois?

Si le prochain Sommet arabe s’annonce intéressant, c’est aussi parce que les sujets évités auparavant devraient être abordés. Il s’agit notamment des crises en Syrie (le roi de Jordanie a invité la Russie pour éviter toute paralysie des négociations eu égard au rôle que joue ce pays au Moyen-Orient), au Yémen, en Libye, mais aussi du conflit israélo-palestinien. Le retour de Mohammed VI, qui est également président du comité Al Qods, après douze ans d’absence à ce Sommet, ne pouvait être mieux choisi pour évoquer ce conflit. La lutte contre le terrorisme sera également à l’ordre du jour.

Un casting de participants différent appellerait un Sommet arabe différent. Cela veut-il pour autant dire que cette 28e édition sera une réussite ? Antoine Basbous, directeur de l’Observatoire des pays arabes (OPA), explique à Telquel.ma que le monde arabe est « divisé et troublé« . Résultat: aucun chef d’État ne peut se prévaloir du leadership nécessaire pour se présenter en rassembleur.

La Ligue arabe, ce grand corps malade

De plus, comme il s’agit d’une présidence tournante, le chef d’État organisateur n’a pas de légitimité en dehors du sommet qu’organise son pays. Antoine Basbous ajoute que malgré les interventions exceptionnelles européennes, le sommet arabe ne se soldera pas automatiquement par un succès, car il ne fait que «  refléter une Ligue arabe malade« . Celle-ci, selon le directeur de l’OPA, serait morte, mais les pays arabes attendent toujours son acte de décès. La ligue arabe n’est plus qu’un « corps inanimé« . Le spécialiste a du mal à voir dans cette 28e édition une exception malgré les acteurs convoqués pour l’occasion.

Déjà en avril 1966, deux ans après le premier Sommet arabe, Eric Rouleau*, diplomate français, pointait « les méfiances, les divergences et les antagonismes entre les États membres » qui empoisonnaient le sommet. Cette rencontre, définie par le directeur de l’OPA comme un « rendez-vous où les chefs d’État arabes font semblant de se réunir alors que rien n’est décidé », ne serait plus qu’un « nom symbolique sans conséquence« .

* » La Ligue arabe est-elle entrée dans une nouvelle phase critique ? « , Avril 1966, Le Monde Diplomatique, Eric ROULEAU. 

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