Imbroglio autour de l’élection des journalistes au Conseil national de la presse

Le mode de scrutin pour désigner les sept journalistes qui devront siéger dans le futur Conseil national de la presse (CNP) fait débat parmi les professionnels.

Par

Mohamed Laaraj, ministre de la Culture et de la Communication.

Accusant un retard toujours inexpliqué, la Commission chargée de conduire les travaux de mise en place du futur Conseil national de la presse est aujourd’hui au coeur d’une polémique à cause du mode d’élection préconisé pour désigner les sept représentants de la profession au sein cette institution.

Le Forum marocain des jeunes journalistes (FMJJ), créé en 2017 et composé d’une centaine de membres, a dénoncé dans un communiqué daté du lundi 13 novembre un  » blackout » autour de la question.

« Le Forum prend acte d’informations – de sources dignes de foi- selon lesquelles le ministère de la Communication plancherait sur un arrêté établissant  » le scrutin de liste fermée  » comme mode d’élection des représentants des journalistes au Conseil national de la presse« , lit-on.

Dans cette optique de liste fermée, les journalistes souhaitant se porter candidats aux élections doivent, en plus de justifier 15 ans de pratique dans la profession, être portés par l’un des syndicats les plus représentatifs du métier.

Sami El Moudni, président du FMJJ, nous déclare: « on ne peut valider le fait que les journalistes ne votent pas pour leurs représentants par voie démocratique. Aucun membre du Forum ne se portera candidat, mais il y a des responsables dignes de confiance, que nous souhaiterions avoir la liberté d’élire« . Il invoque notamment l’article 4 de la loi 90-13 portant création du Conseil, qui ne fait aucune mention du mode de scrutin.

Le président du FJJM voit dans cette option un « contournement des règles démocratiques » en privilégiant la candidature d' »une poignée de journalistes« . Sami El Moudni n’exclut pas d’ailleurs le boycott de ces élections par son collectif « s’il n’y a pas de recours à une liste ouverte à tous, tout en respectant les dispositions de la loi par rapport aux 15 ans d’ancienneté« . Une condition que le Forum souhaite tout de même rabaisser à 5 ans dans le cadre d’un amendement de la loi 90-13.

Le président du Syndicat national de la presse au Maroc (SNPM), Abdallah Bakkali nous affirme de son côté que « le recours à une liste fermée est inévitable puisque la composante du futur Conseil doit être homogène« .

Pour le rédacteur en chef du quotidien arabophone Al Alam, « le vote doit se faire pour un collectif et non pour des personnes« . Il justifie sa position par le fait que les sept journalistes devant être élus se répartissent entre représentants de la MAP (1 élu), de la presse audiovisuelle (2 élus), écrite (3 élus) et électronique (1 élu).

Le problème se pose plutôt , selon Abdallah Bakkali, au niveau du lieu du vote. « Comment concevoir que les élections se tiennent dans des établissements publics qui ont toujours combattu l’action syndicale?« , s’interroge-t-il. Bakkali déclare d’ailleurs que le SNPM a soumis un amendement au cours d’une réunion avec le ministère de la Communication pour la tenue des élections « dans un lieu neutre« .

Sollicité par nos soins pour plus d’éclaircissements sur ce sujet, le ministre de la Communication Mohamed Laâraj est resté injoignable. Mais une source de son département a déclaré lundi sur le site Al Omq qu' »à ce jour, aucune sorte préparation technique ou logistique n’a été entamée pour l’élection des membres du Conseil« .

L’enjeu de cette élection reste crucial puisque le CNP est prédestiné à assurer l’indépendance du secteur de la presse vis-à-vis de l’administration. Il héritera en ce sens, de plusieurs fonctions relevant actuellement du ministère de la Communication.

Notons que l’article 54 de la loi 90-13 dispose que la commission chargée de mettre en place le Conseil et d’élire ses membres est présidée par un magistrat désigné par le Conseil supérieur du pouvoir judiciaire, aux côtés duquel siègent un représentant du ministère de la Communication, du SNPM, de la Fédération marocaine d’éditeurs de journaux (FMEJ), du Conseil national des droits de l’Homme (CNDH) et de l’Association des Barreaux du Maroc.

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