Le continent africain crie son indignation après la "vente" de migrants en Libye

Après la vidéo de CNN montrant des migrants de subsahariens vendus comme esclaves en Libye, société civile et hommes politiques africains ont fait part de leur indignation sur la toile.

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Crédits photos : Capture d'écran de la vidéo diffusée par CNN.

Que ce soit les politiciens ou la société civile, l’Afrique s’indigne suite à la diffusion, mardi 14 novembre, d’un sujet de la chaîne américaine CNN montrant des migrants subsahariens vendus aux enchères comme des esclaves.

Alpha Condé, chef d’État guinéen, et président de la Conférence de l’Union africaine (UA), a exprimé dans un communiqué publié le 17 novembre, sa révolte face à ce trafic d’êtres humains qu’il qualifie d' »ignominie« . Il a d’ailleurs annoncé que des actions urgentes seraient prises au sein de l’UA pour mettre fin à ce « commerce abject« .

Selon le site d’information AfricaGuinee, une réunion est prévue avec les autres chefs d’État du continent. « Nous allons prendre des dispositions pour obliger les pays qui ont permis cela de mettre fin à cette situation aussi abjecte, indigne et qui est contraire à tout humanisme », a affirmé le dirigeant.

Dans son viseur: la Libye, mais aussi l’Europe. « C’est les Européens qui ont demandé aux Libyens de bloquer les gens là-bas. Donc, il y a aussi la responsabilité de l’Europe« , a-t-il affirmé au micro de RFI.

D’autres présidents africains se sont exprimés sur le sujet. C’est le cas de Macky Sall, président du Sénégal, qui « dénonce fermement le trafic d’êtres humains qui sévit sur le territoire libyen » dans un tweet publié le 17 novembre.

Dans un communiqué rendu public dans la foulée, le gouvernement sénégalais « engage les autorités libyennes compétentes, ainsi que l’Union africaine et l’Organisation des Nations unies, à diligenter sans délai une enquête sur cette pratique d’un autre âge afin que toutes les dispositions soient prises pour y mettre fin ». 

Le président du Niger, Mahamadou Issoufou, a été le premier à réagir à la polémique dès jeudi 16 novembre, lui aussi via son compte Twitter. Il se dit indigné par cette « vente aux enchères de migrants » et appelle les autorités Libyennes à agir pour que cesse « cette pratique d’un autre âge« .

Le ministre nigérien des Affaires étrangères, Ibrahim Yacouba, a affirmé sur son compte Twitter que le président du Niger a demandé que cette question soit inscrite à la prochaine réunion UE-UA qui se tiendra les 29 et 30 novembre à Abidjan.

Enfin, le président du Burkina Faso, Roch Kaboré, a suivi ses homologues en condamnant lui aussi dans un tweet publié vendredi 17 novembre les « horreurs » subies par les migrants en Libye. Il a également appelé les autorités libyennes à « sévir vigoureusement contre le trafic d’êtres humains« .

Société civile en colère

Depuis la diffusion de la vidéo, la société civile africaine elle aussi est en colère. L’écrivain sénégalais Felwine Saar s’indignait dans un long post Facebook publié le 16 novembre du manque de réaction « de la part des dirigeants des pays d’où viennent ces jeunes« . Il y appelle « Macky Sall, Ibrahim Boubacar Keita, Issoufou, Kaboré, Condé, Ouattara, etc » à « faire une déclaration commune, s’indigner au plus haut point, envoyer le message à ces jeunes que leur humanité et leur dignité sont primordiales ».

Le producteur et animateur Claudy Siar a lui aussi affirmé sa « haine« , mais en vidéo cette fois. Dans celle-ci, publiée le 16 novembre et largement partagée sur Facebook, il parle en tant que « descendant d’esclave« . Il y dénonce lui aussi le rôle de la politique migratoire de la France et des autres pays européens. « Aujourd’hui on est en train de vendre (…) nos jeunes. On les enferme dans des cages et on les vend aux plus offrants et ça ne vous fait rien ?« , s’énerve-t-il.

Le célèbre reggae-man ivoirien, Alpha Blondy, dans un message vidéo publié le 17 novembre très partagé sur les réseaux sociaux, a lui aussi interpellé les dirigeants africains. Dans sa vidéo l’artiste demande à tous les Africains d’où qu’ils soient d’assiéger les ambassades libyennes.

Un appel de l’artiste qui semble avoir été écouté puisque des manifestations ont eu lieu ce samedi 18 novembre 2017 devant l’ambassade de la Libye à Paris. 6.000 personnes auraient participé à l’événement selon Claudy Siar, instigateur du rassemblement. La préfecture de police de Paris évoque de son côté un millier de manifestants.

Un autre sit-in d’indignation et de protestation est prévu ce jeudi 23 novembre devant l’ambassade de Libye à Rabat, à partir de 18h30. Par ailleurs, une pétition a également été lancée la semaine dernière pour demander la fermeture de ces sites et l’arrêt de cette pratique. Cette dernière a recueilli plus de 240.000 signatures à ce jour.

De son côté, le gouvernement libyen d’union nationale (GNA), dénonce dans un communiqué lu à la presse dimanche 19 novembre, des actes « inhumains« , et affirme qu’une enquête a été ouverte sur des cas d’esclavage près de la capitale Tripoli. « Si ces allégations sont confirmées, toutes les personnes impliquées dans ces crimes seront punies« , a enfin promis ce dernier.

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