Retour des lames à Mélilia pour dissuader les migrants de franchir le poste frontière

Les autorités de Mélilia ont décidé d'installer des petites lames tranchantes sur les barbelés de la clôture frontalière.

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Un migrant montre une de ses mains, bléssée lors d'une tentative de passer la frontière. / José Luis Roca / AFP

Dans le but de freiner l’immigration irrégulière vers l’Espagne, les autorités portuaires de Mélilia ont pris la décision d’équiper la clôture qui la sépare du Maroc de barbelés et de petites lames coupantes, rapporte le journal espagnol Diario de Sevilla.

En 2007, suite à de nombreuses blessures de migrants subsahariens, le gouvernement socialiste de José Luis Rodriguez Zapatero avait fait retirer les lames. Mais, l’immigration clandestine s’étant intensifiée, elles ont été replacées en 2013, sous le gouvernement de Mariano Rajoy.

Aujourd’hui, l’Espagne continue de recourir aux barbelés et aux lames, mais cette fois ce n’est pas le ministère de l’Intérieur qui en a décidé, mais l’Autorité portuaire de Mélilia (APM). La semaine dernière, Miguel Marín, président de l’APM a annoncé que la clôture sera renforcée par un « système de baïonnettes et de barbelés » dont l’installation, déjà commencée, coûtera 468.000 euros.

Cette mesure ne vise plus seulement les migrants subsahariens, mais également les mineurs marocains non accompagnés qui entrent à Mélilia dans l’espoir de rejoindre clandestinement l’Europe à bord des ferries vers l’Espagne.

Miguel Marín explique qu’il s’agit d’une « mesure dissuasive » dont l’objectif est de « décourager les jeunes Marocains qui arrivent à Mélilia de se rendre clandestinement en Europe« . Il ajoute également que « si les jeunes n’essayent pas de franchir la frontière, ils ne seront pas blessés ».

Premières victimes

Dimanche dernier, dans la matinée, les lames ont fait leurs premières victimes. Les passagers d’un ferry ont aperçu deux jeunes Marocains dont une partie des vêtements étaient restés accrochés en haut de la clôture. Ils ont averti la police du port, qui les a secourus.

Cette décision a été presque unanimement critiquée par les partis politiques espagnols, mais aussi par des associations de la société civile, la jugeant « inhumaine« , mais surtout « inutile« .

En effet, l’installation des barbelés et lames n’a pas su dissuader les migrants de passer les clôtures, puisqu’ils étaient près de 4.200 à avoir pénétré par voie terrestre à Mélilia en 2017 contre 5.551 en 2005, l’année ou la décision de les placer pour la première fois a été prise.

Aberchan Mustafa, leader de l’opposition à Mélilia, a quant à lui déclaré que Miguel Martin et le gouvernement autonome de la ville « seront tenus responsables pour les blessures qui pourraient survenir le long de la clôture« . 

L’Association unifiée de la Garde civile (AUGC) a souligné pour sa part qu’il serait préférable de renforcer premièrement le personnel aux frontières, surtout d’augmenter les contrôles à l’entrée du port où il n’y a pour le moment qu’un seul agent.

Pour Mohamed Benaissa, président de l’Observatoire du nord pour les Droits de l’Homme au Maroc (ONDH), « la mise en place de lames est contraire à la Déclaration universelle des droits de l’Homme, et constitue un danger pour la vie des migrants« .

Il ajoute que « cela ne les dissuadera pas de tenter de traverser la frontière. Historiquement, quelles que soient les mesures prises par les autorités marocaines ou espagnoles, cela n’a pas fait baisser les chiffres de l’immigration clandestine« .

Aujourd’hui, des ONG espagnoles font pression auprès de Madrid afin qu’elle fasse marche arrière.

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