Antonio Guterres plaide pour le maintien de la Minurso

Dans son rapport sur la Minurso, le secrétaire général de l’ONU a demandé au Conseil de sécurité de proroger le mandat de la mission onusienne pour une durée d’un an. Selon lui, la mission de maintien de la paix est garante de la stabilité dans la région.  

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Antonio Guterres, secrétaire général des Nations unies. Crédit: AFP

Alors que la diplomatie américaine, sous l’impulsion du conseiller présidentiel à la sécurité nationale John Bolton, a récemment témoigné de sa volonté de mettre fin aux activités de la Mission des Nations Unies au Sahara (Minurso) craignant de la voir transformée en « entité à l’existence quasi perpétuelle », c’est un véritable plaidoyer pour son maintien qu’Antonio Guterres a livré dans son dernier rapport consacré à la mission de maintien de la paix onusienne. Rendue publique ce 4 octobre, une copie avancée du document revient en longueur sur les dernières évolutions du conflit régional et détaille les résultats d’un « examen indépendant » sur la mission onusienne. Tour d’horizon.

Une mission à sauvegarder

Dès le 8e paragraphe de son rapport, Antonio Guterres se porte en défenseur du cessez-le-feu que la Minurso est censée assurer. À ce sujet, il affirme que le Maroc et le Polisario « partagent la vision selon laquelle l’architecture du cessez-le-feu joue un rôle central dans la stabilisation de la situation au Sahara occidental ».

Quelques paragraphes plus loin, le secrétaire général de l’ONU évoque directement la mission de maintien de la paix en affirmant que l’ensemble des interlocuteurs que son envoyé personnel pour le Sahara Horst Köhler a rencontrés durant sa dernière tournée régionale ont noté qu’un « arrêt de la Minurso pourrait avoir un impact significatif sur la stabilité et pourrait coûter bien plus à la communauté internationale que le budget actuel de la mission ». Pour rappel, l’ancien président allemand a rencontré des représentants du Maroc, du Polisario, de l’Algérie et de la Mauritanie lors de sa dernière tournée régionale à la fin du mois de juin.

Pour défendre la Minurso, Antonio Guterres s’appuie également sur un examen de la mission effectué par une experte indépendante en la personne de Diane Corner, ancienne représentante spéciale de la Mission des Nations Unies pour la stabilisation en Centrafrique (Minusca) suite à une demande émise par le Conseil de sécurité au mois d’avril dernier. Menée durant le mois de juin, cette étude a permis de révéler que la Minurso effectue « trois fonctions décisives pour éviter une escalade du conflit ».

La première est d’éviter « une escalade suite à des incidents liés au cessez-le-feu », la deuxième est le fait que la Minurso « s’assure que la situation sur le terrain permette de soutenir les efforts de l’envoyé personnel pour ressusciter le processus politique ». Enfin, cet examen montre que la présence de la mission onusienne « contribue au maintien de la stabilité régionale du Maghreb ».

Le rapport élaboré par Diane Corner suggère également des améliorations à apporter à la mission de maintien de la paix. Parmi ces suggestions, une révision des patrouilles des effectifs de la Minurso le long des 2500 kilomètres du mur de défense marocain qui sont devenues « prévisibles et répétitives » tout en ne permettant pas d’« optimiser les ressources de la mission ». Selon l’experte, ces patrouilles doivent être désormais définies en termes de « qualité » et non pas de quantité. L’application de cette suggestion doit néanmoins faire l’objet « du consentement des parties » selon Antonio Guterres.

Enfin, au 86e paragraphe de son rapport, le secrétaire général affiche clairement son soutien à la mission affirmant que « la Minurso a constamment prouvé être un moyen efficace pour prévenir le conflit depuis sa création en 1991 ». Il indique aussi que la mission a joué un rôle crucial « pour permettre à son envoyé personnel, à travers des efforts intenses durant les six derniers mois, de faire des progrès notables vers une solution politique à la question du Sahara occidental ».

À ce titre, il suggère de proroger le mandat de la mission onusienne pour une durée d’un an jusqu’au 30 octobre 2019. Au mois d’avril dernier, le Conseil de sécurité avait ignoré les recommandations du secrétaire général de l’ONU et convenu de proroger le mandat de la mission pour une durée de six mois, dans le but d’accélérer la relance des négociations entre le Maroc et le Polisario.

Avancées

La recherche d’une solution politique pourrait justement être accélérée les 5 et 6 décembre prochains. En effet, dans son rapport Antonio Guterres confirme que son envoyé personnel a adressé une invitation aux deux parties du conflit à une table ronde devant faire office de « discussions préliminaires » dans la recherche d’une solution au conflit du Sahara devant se tenir à Genève.

Une rencontre à laquelle ont également été conviées l’Algérie et la Mauritanie en tant que pays voisins. Si Rabat et Tindouf ont répondu favorablement à cette invitation, les réponses d’Alger et Nouakchott se font, elles, toujours attendre. Les deux pays ont jusqu’au 20 octobre prochain pour accepter l’invitation qui leur a été adressée par Horst Köhler. On notera toutefois que dans son rapport, Antonio Guterres informe le Conseil de sécurité que les deux pays ont fait part de leur volonté d’être davantage impliqués dans la résolution du dossier.

L’organisation de cette table ronde a sans doute été favorisée par l’absence d’incidents significatifs durant les six derniers mois, comme en témoigne le deuxième paragraphe du rapport du secrétaire général de l’ONU : « depuis mon dernier rapport, le calme général a prévalu dans le territoire (le Sahara, ndlr) des deux côtés du berm ».

Le secrétaire général évoque également certains développements pouvant contribuer à réduire les tensions entre le Maroc et le Polisario. Parmi eux, le retrait d’éléments du mouvement séparatiste de la zone de Guergarat depuis le 22 avril dernier. C’est justement la présence de ces éléments, et une opération de goudronnage entamée par le Maroc, qui avaient été à l’origine de tensions entre les deux parties au début de l’année 2017. Côté Polisario, ce retrait « permanent » a été confirmé par le secrétaire général du Front, Brahim Ghali, à Horst Köhler.

Autre nouveauté, le mouvement séparatiste s’est également engagé à ne pas relocaliser son administration à Tifariti et Bir Lahlou. Des constructions entamées par le Polisario en début d’année 2018 dans ces deux localités situées à l’est du mur de défense étaient à l’origine de nouvelles tensions avec le Maroc au mois de mars dernier. Le secrétaire général de l’ONU révèle également qu’un bâtiment d’un étage et comprenant 36 chambres, désigné comme étant une « construction civile » par le Polisario a été érigé. Toutefois l’ONU n’a pu déterminer la fonction dévolue à ce bâtiment par le mouvement séparatiste.

Suite à la publication de ce rapport, le Conseil de sécurité de l’ONU se réunira le 9 octobre prochain dans le cadre d’une réunion consacrée aux pays contributeurs de troupes. Deux jours plus tard, une autre réunion de consultation se tiendra au siège des Nations Unies. Enfin, le 29 octobre les 15 membres du Conseil de sécurité se réuniront pour voter ou non la résolution relative à la prorogation du mandat de la Minurso.

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