Surcharge hospitalière et mauvaise prévention, les autres risques du coronavirus

Dans une contribution pour l’association Tafra Maroc, l’épidémiologiste et enseignant chercheur Youssef Oulhote évoque les véritables risques du coronavirus et la nécessité de mesures fortes pour prévenir sa contagion.

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Dressant l’hypothèse que 20 % de la population adulte sera infectée au Maroc, à savoir 4 millions de personnes, et que 10 % d’entre elles nécessiteront une aide respiratoire ou présenteront un cas de réanimation, il faudrait 400.000 lits, contre 40.000 disponibles actuellement, pour absorber le nombre de cas. Crédit: AIC PRESS

Youssef Oulhote, docteur en épidémiologie et biostatistique, enseignant-chercheur à l’université du Massachusetts et à l’École de Santé publique de l’université de Harvard a expliqué, dans une contribution à TAFRA Maroc publiée le 13 mars, les véritables risques qui pesaient sur le pays quant à la pandémie de coronavirus.

Risque de surcharge

Au-delà de la dangerosité intrinsèque du Covid-19, le professeur met l’accent sur la période de propagation virale. “Il faut retenir que le nombre de cas de grippe saisonnière est réparti sur une période de huit mois ou plus, alors que les cas de Covid-19 augmentent de façon exponentielle au cours de quelques semaines, comme on l’observe actuellement”, explique Youssef Oulhote dans son texte. Le véritable risque est donc une surcharge du système de santé avec des malades en besoin de réanimation qui arrivent à l’hôpital au même moment.

“Le Maroc possède 1,1 lit pour 1000 habitants”

Youssef Oulhote

Un cas de figure qui, selon l’enseignant-chercheur à l’université du Massachusetts, mettra fortement sous pression les pays les moins avancés et les pays émergents. “Le Maroc fera face à une situation sanitaire critique dans la gestion du Covid-19 parce que sa capacité hospitalière est très limitée. Le Maroc possède 1,1 lit pour 1000 habitants, et cette capacité n’a cessé de diminuer depuis les années 1960”, rappelle Youssef Oulhote.

En l’asbence de mesures préventives adéquates,  20 % de la population adulte sera infectée au Maroc, à savoir 4 millions de personnes, et que 10 % d’entre elles nécessiteront une aide respiratoire ou présenteront un cas de réanimation, il faudrait 400.000 lits, contre 40.000 disponibles actuellement, pour absorber le nombre de cas selon le chercheur.

Meilleure option : la prévention

Pour Youssef Oulhote, la meilleure option reste les mesures massives de prévention pour “limiter” et non pas “stopper” les cas de propagation. “Selon les experts de l’OMS, il faut tester le maximum de personnes, retracer l’origine de la transmission pour mettre en quarantaine toutes les personnes infectées. Le testing intensif, l’enquête et la quarantaine permettent de ralentir l’épidémie”, explique-t-il.

L’épidémiologiste prend l’exemple de la grippe espagnole de 1918-1919 dans différentes villes des États-Unis.

Graphique montrant l’évolution du nombre de cas de grippe espagnole dans deux villes des États-Unis après des mesures de prévention.Crédit: Site de Tafra Maroc

Ce dernier pointe le fait que “la différence a tenu aux mesures préventives appliquées, et à quel moment. Dans l’exemple ci-dessus, la ville de Saint Louis a pris des mesures de confinement 6 jours avant Pittsburgh. La différence en termes de mortalité est de 358 pour 100.000 habitants à Saint Louis, contre 807 morts pour 100.000 habitants à Pittsburgh”. D’où la nécessité de respecter et d’appliquer les mesures de prévention annoncées.

Recommandations à titre individuel

• En cas de suspicion, s’isoler du reste de la famille, appeler la hotline sans se déplacer à l’hôpital, sauf aggravation du cas. (Au Maroc, il s’agit de ALLÔ YAKADA 0801004747, ndlr)

• Éviter les cafés, les marchés, et les lieux à haute densité de population.

• Appliquer les mesures habituelles d’hygiène : se laver régulièrement les mains au savon, couvrir les éternuements et la toux, ouvrir les fenêtres pour aérer, laver les poignées de portes quotidiennement, isoler les personnes susceptibles, incluant personnes âgées, les diabétiques, les malades cardiovasculaires, pulmonaires, et personnes atteintes de cancer ou immunodéficientes.