Chronique d’un confinement. Jour 26

Confinée dans son appartement parisien, notre chroniqueuse Fatym Layachi nous fait le récit quotidien d’une vie entre quatre murs.

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Jour 26. Le confinement creuse les inégalités.

Samedi 11 avril

Jour 26

Ça fait donc à peu près un mois que la majorité de la planète est confinée. Et ça fait à peu près un mois que j’entends et que le lis à peu près partout des choses très touchantes sur la notion d’ensemble, de collectif. Je trouve ça très beau. Très beau parce que vrai.

Effectivement, c’est la première fois que nous sommes tous sur le même bateau. Vraiment tous. Que nous expérimentons l’inquiétude collective. Que nous sommes tous touchés, qui que nous soyons. Puissants et misérables, comme dans la Fable.

Cela dit, constater que nous sommes ensemble ne veut en aucun cas dire que nous sommes tous égaux. Loin de là !

Puissants ou misérables, votre confinement est bien différent.

Ce serait tellement niais de croire que cette quarantaine serait équitable ou égalitaire. Bien au contraire, le confinement creuse les inégalités.

Il y a d’abord les injustices du quotidien qui sont décuplées. La condition physique, le type de logement, les revenus, les dettes sont autant de facteurs qui peuvent rendre le confinement très dur, voire insoutenable, pour ceux qui n’ont tout simplement pas les moyens de se confiner. Et sur bien des aspects, le confinement peut presque apparaître comme un luxe. S’arrêter de produire, de se déplacer, de travailler, de vendre peut pour certains vouloir dire tout perdre, ne plus rien avoir. S’effondrer, devenir indigent.

La capacité de faire des provisions creuse les inégalités.

L’accès aux outils de communication creuse les inégalités.

L’école à la maison creuse les inégalités.

Et puis bien évidemment le confinement augmente les inégalités entre les femmes et les hommes. Comme bien souvent, ce sont les femmes qui sont en première ligne. Les femmes sont surreprésentées dans tous ces métiers essentiels, à risque et souvent sous-rémunérés. Femmes de ménage, aides-soignantes, infirmières, caissières, cuisinières… Ces mêmes femmes qui souvent en rentrant chez elles doivent s’occuper de leur foyer.  Là encore souvent seules. Je serais curieuse de connaître le pourcentage d’hommes qui effectue la moitié des tâches ménagères. Le confinement accroît la charge mentale des femmes et le confinement rajoute de la pression aux femmes.

Et puis il y a toutes ces femmes, victimes de violences domestiques qui vivent la double peine, enfermées avec leur bourreau. Il est impossible de ne pas penser à elles. Comme le dit si puissamment Sorj Chalandon dans une lettre qui leur est adressée, “nous pensons à vous parce qu’en plus des murs clos, un Minotaure vous terrorise”. Cette lettre forte a été lue par Augustin Trapenard et peut être écoutée ici.