Lancée sur le marché marocain en 2005, la voiture low cost de Renault s’est accaparé 25% des parts de marché. Retour sur l’histoire de la marque la plus vendue au royaume.
Amine est un jeune cadre d’une compagnie d’assurances. Ce trentenaire vient de faire un achat dont il n’est pas peu fier : une Dacia Logan. « Depuis que je me suis débarrassé de mon ancienne voiture, vieille de douze ans, j’ai fait le tour des showrooms pour trouver un véhicule qui corresponde à mon budget. Et après une petite comparaison des offres de la même gamme, j’ai vite fait mon choix. C’est le meilleur rapport qualité/prix qui existe sur le marché », tranche-t-il, l’air satisfait. C’est que la marque low cost de Renault séduit. Avec ses modèles Logan, Sandero et Duster, la voiture au logo argenté avance des arguments qui défient toute concurrence : prix bas, simplicité d’utilisation, entretien économique, fiabilité correcte… Résultat, Dacia triomphe sur le podium des ventes. Au terme du premier semestre, la marque a réalisé quelque 17 391 immatriculations, en progression de 18,24% par rapport à fin juin 2013. Une belle performance qui lui permet de s’accaparer près de 25% de parts de marché. Pourtant, au moment de son lancement au Maroc, les observateurs ne prédisaient pas un avenir aussi florissant à cette voiture.
De la Roumanie au Maroc
Nous sommes en 2004. La marque au losange, malmenée en France comme dans d’autres pays, décide de revoir sa stratégie de fond en comble. Sa nouvelle arme de bataille : le low cost. Après une montée en puissance dans le capital de Dacia, une marque roumaine créée dans les années 1960 sous l’égide du dictateur communiste Nicolae Ceaucescu, Renault décide d’en faire son cheval de bataille. Un pari qui s’est vite avéré gagnant. Après les premiers coups d’éclat enregistrés en Roumanie et en Russie, Renault jette son dévolu sur le Maroc. Un pays où le constructeur compte déjà une base arrière, la Somaca, où se fait le montage de la nouvelle voiture. Juillet 2005, c’est l’heure de vérité. Dacia met sur le marché son modèle Logan. Avec l’éclosion sur le segment des petites voitures de plusieurs concurrents, en particulier asiatiques, qui ont réussi à concocter des modèles très compétitifs, l’entrée en jeu de Logan s’annonce difficile. Mais la marque à bas prix va très vite chambouler la donne du marché automobile marocain. Damant le pion, entre autres, à la Kia Picanto, véritable phénomène auprès des jeunes et des femmes, Logan fait feu de tout bois et se hisse rapidement en tête du top 10 des ventes. Depuis 2006, elle est la voiture la plus vendue au Maroc, tous modèles confondus. « Dacia n’a cessé d’évoluer et d’enrichir sa gamme pour devenir la marque préférée des Marocains. Elle commercialise une large gamme de produits résolument jeune, riche, étendue, à des prix imbattables », se targue Gérald Porcario, directeur marketing commerce de Renault au Maroc, qui avance un chiffre éloquent : « A fin octobre 2014, Dacia a écoulé sur le marché marocain pas moins de 187 255 unités depuis son lancement ». Un record. Mieux, le succès dépasse les frontières marocaines. A partir du royaume, les modèles de Dacia ont conquis plusieurs marchés européens et, dans le cadre des accords d’Agadir, l’Egypte, la Tunisie et la Jordanie.
Achat (très) malin
Mais quelle est la recette de Dacia pour être la marque la plus vendue au Maroc ? « Elle réussit grâce à son positionnement dans le smart buy (l’achat malin), ce qui permet d’offrir un produit de qualité répondant à tous les besoins du client à des prix très attractifs », répond le directeur marketing de Renault Maroc. Un véhicule 5 places avec un coffre de 500 litres à partir de 74 900 dirhams TTC avec, en prime, des moteurs Renault et une garantie de 3 ans, difficile de trouver mieux sur le marché. Mais si la marque arrive à casser les prix, c’est que, derrière, il y a des économies d’échelle qui font une sacrée différence. Dans la banlieue de Casablanca, à Aïn Sebaâ, les ateliers de Somaca fournissent jusqu’à 50% des composants des différents modèles de Dacia. En plus de la main d’œuvre bon marché, recrutée localement, Renault fait jouer la stratégie de plateforme. Comprenez, un partage des sous-équipements entre plusieurs modèles du même constructeur. Sous le capot, le moteur, le train avant et les freins arrière des modèles de Dacia sont les mêmes que ceux qui font tourner la Clio, par exemple. Une technique qui permet de minimiser considérablement les coûts de revient. Mais il n’y a pas que cela. La main invisible de l’Etat donne aussi à la voiture plusieurs longueurs d’avance sur ses concurrents. Un projet socio-économique de cette envergure, qui a balisé le terrain pour l’installation de Renault à Tanger, a les faveurs des pouvoirs publics, qui n’hésitent pas à sortir la carotte fiscale dans ce cas de figure : un tarif douanier nul (droits d’importation) et un taux de TVA à 7%. Alors que les concurrents doivent s’acquitter de 7,5% de droits d’importation pour leurs voitures européennes et 27% pour les asiatiques, ainsi qu’une TVA de 20%. Un avantage concédé à Renault qui fait sortir de ses gonds cet agent commercial d’une marque concurrente : « Vu les avantages dont Renault bénéficie, les prix devraient être encore plus bas. Car l’opérateur engrange de larges bénéfices sur ses modèles Dacia ». Parole de concurrent jaloux ? Le constructeur français s’est abstenu de tout commentaire.
Tarik Hari
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