De nouvelles conditions d’hospitalisation pour les malades mentaux

Un projet de loi encadre l’hospitalisation des personnes atteintes de troubles mentaux tout en tentant de garantir au maximum leurs droits.

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Crédit : PDPics/Pixabay.

La santé mentale est la priorité n°2 du ministère de la Santé, l’évacuation de Bouya Omar en atteste. Si les associations félicitent la prise de conscience, les mesures concrètes tardent à se faire sentir. Parallèlement, un projet de loi relative à la lutte contre les troubles mentaux et à la protection des droits des personnes atteintes de ces troubles vient d’être déposé au Secrétariat général au gouvernement. Le texte (le dernier en la matière date de 1959) décrit les différents modes de soins, les conditions pour hospitaliser quelqu’un contre son gré ou encore les droits dont la personne hospitalisée doit toujours jouir. Beaucoup de dispositions restent floues en attente d’être précisées par voie réglementaire. Qu’en est-il du reste ?

Encadrement de l’hospitalisation forcée

Le texte différencie différents modes: les soins externes, l’hospitalisation (dans le service psychiatrique d’un hôpital ou dans un établissement spécifique, public ou privé), le suivi médical obligatoire externe et enfin la réhabilitation et la réinsertion sociale. L’hospitalisation peut être consentie ou non. Dans le premier cas, le consentement doit se faire par écrit.

Le second est conditionné par la nécessité absolue de placer le patient sous surveillance, que sa maladie mentale l’empêche de prendre la décision de se faire hospitaliser et qu’il présente un danger pour sa vie ou celle des autres s’il ne reçoit pas de traitement. Il doit s’agir d’une décision de la justice, du gouverneur ou du directeur de l’établissement hospitalier (dans ce dernier cas, sur demande d’un proche ou d’un directeur de prison). Lorsqu’un patient est placé en hospitalisation involontaire, l’établissement qui l’accueille doit en informer la commission régionale de la santé mentale.

C’est ce projet de loi qui instaure ces commissions régionales et une commission nationale. Au niveau régional, elles contrôlent les conditions de traitement (notamment en réalisant des visites surprises dans les établissements) et statuent sur les recours des patients. Au niveau national, elle participe à l’élaboration des politiques et stratégies sur le sujet et réalise un rapport annuel.

Sur le papier, pas d’hôpital aux allures de prison

Lors d’hospitalisation forcée, le patient est d’abord placé en observation trois jours maximum, ensuite l’établissement décide ou non de changer le mode de prise en charge. S’il est convenu de le garder en hospitalisation forcée, celle-ci ne doit pas durer plus de trois mois. A cette issue, c’est à la commission régionale, après évaluation médicale indépendante, de statuer.

Le texte cherche à garantir les droits des personnes atteintes de troubles mentaux, précisant que la stigmatisation et la discrimination sont des facteurs supplémentaires de leurs troubles. L’article 3 du projet de loi stipule que le traitement doit se réaliser dans un environnement « le moins restrictif possible » et doit garantir les droits et libertés dont jouissent tous les autres citoyens. Une réelle nécessité, à en croire le rapport du Conseil national des droits de l’Homme de 2012, qui décrit les hôpitaux psychiatriques comme des prisons. La loi ne dit pas vraiment comment ces droits sont assurés (hormis par le biais des recours et des plaintes que peuvent déposer les patients) mais en liste quelques uns. Parmi eux : le droit de consulter son dossier médical, celui d’avoir les informations complètes sur son diagnostic ou son traitement ou encore celui d’envoyer et de recevoir du courrier.

Pas d’électrochoc sans consentement

Le texte interdit certaines pratiques médicales et limite l’usage d’autres. La psychochirurgie, les électrochocs et les neuroleptiques à action prolongée ne peuvent être effectués sans le consentement du patient et l’avis favorable de la commission régionale. Le projet de loi précise que les traitements irréversibles comme la stérilisation par exemple, ne peuvent être appliqués en tant que traitements des maladies mentales.

Dans le préambule, il est expliqué que le texte vient aussi encadrer la prévention et la réinsertion mais malheureusement, le chapitre consacré au sujet reste très flou : il liste les acteurs de cette activité mais en aucun cas les actions à mener. Les critères pour offrir l’agrément aux établissements chargés de cette réhabilitation sont eux aussi à fixer par voie réglementaire. L’article 8 stipule que les personnes concernées ont le droit « dans la mesure du possible » à l’éducation et à la formation.

Regarder la vidéo :  Soukaina, symbole de la maltraitance des malades mentaux

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