Seddiki: "C’est fini l’emploi dans la fonction publique"

Dans une conférence à destination d’entrepreneurs, Abdeslam Seddiki a défendu sa stratégie nationale pour l’emploi, en répondant à leurs préoccupations parfois de manière... surprenante.

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Abdeslam Seddiki, ministre de l'Emploi et des affaires sociales. Crédit : MAP

« L’emploi c’est l’entreprise. C’est fini l’emploi dans la fonction publique. C’est sur vous que nous comptons pour appliquer la stratégie nationale de l’emploi », a reconnu Abdeslam Seddiki lors d’une conférence organisée le 22 janvier à la Chambre française de commerce et d’industrie du Maroc (CFCIM), face à un parterre de chefs d’entreprise. Invité pour défendre la stratégie nationale de l’emploi (SNE), le ministre de l’Emploi et de l’action sociale, ancien enseignant du supérieur, a reconnu qu’un passage dans le monde de l’entreprise manquait à son cursus.

SOS jeunesse en détresse

D’après les estimations du ministère de l’Emploi, à peine un tiers de la population bénéficie d’un travail décent. Autre gros point noir au tableau : les jeunes. « On ne peut pas se permettre d’avoir 50 % de chômeurs, soit 600 000, entre 15 et 24 ans. Ils ne sont ni à l’école ni au travail, c’est une bombe à retardement », a reconnu le ministre de l’Emploi avant d’ajouter plus tard que « créer des emplois est un des moyens de lutter contre le terrorisme ».

La stratégie nationale de l’emploi, c’est quoi ?

Le ministère d’Abdeslam Seddiki a mis un an pour diagnostiquer la situation de l’emploi au Maroc. Ensuite, son équipe a pris une année supplémentaire pour élaborer cette fameuse stratégie, qui se trouve maintenant au tout début de sa phase d’opérationnalisation et qui est pensée à horizon 2025. But de la SNE : assurer la convergence des différents programmes sectoriels (Vision 2020 pour le tourisme, plan d’accélération industrielle, plan Maroc vert…).

Pour créer de l’emploi, le ministère l’assure, il faut créer de la croissance. Mais problème : la croissance marocaine est très faiblement créatrice d’emploi. D’après les chiffres mis en avant par Abdeslam Seddiki, à chaque fois que le PIB gagne 1 %, le nombre d’emplois n’augmente que de 0,2 %.

Des nouveaux métiers ?

Abdeslam Seddiki a énuméré les différents « leviers » pour inciter à la création d’emplois (valorisation des ressources humaines, lutte contre l’informel…). Mais face à des patrons pressés et friands de réalisations, le ministre a donné quelques exemples de mesures concrètes à adopter. Parmi celles-ci : lier les avantages fiscaux au nombre d’emplois créés ou encore développer des emplois de proximité, que la régionalisation devrait favoriser. Il pense par exemple aux emplois à créer dans le préscolaire. Aujourd’hui, seulement 30 % des enfants âgés de 5 à 7 ans sont scolarisés, alors que « la généralisation du préscolaire pourrait créer 100 000 emplois », estime-t-il. Autre vivier : l’aide à la personne âgée. « Nous avons une population de plus en plus vieillissante mais nous avons jusqu’à présent beaucoup compté sur la solidarité familiale ».

La faute à la formation

« Nous avons un problème manifeste d’adéquation entre la formation et la demande », a reconnu, sans grande surprise, le ministère de l’Emploi. Ainsi, le socialiste a évoqué l’idée de proposer des contenus de formation qui varieraient dans le temps court. « Maintenant, nous allons faire une prospective des besoins sur cinq ans pour avertir nos instituts de formation pour qu’ils s’adaptent », a-t-il expliqué.

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Le ministre a martelé l’importance de la formation continue. « Tout en travaillant, il faut passer la nuit à se recycler pour se préparer à un autre job », image-t-il. Alors que les entrepreneurs lui reprochent le vide juridique dont pâtit l’alternance, le ministre a mis en avant la formation professionnelle et l’apprentissage. Idée surprenante : baisser de 15 à 12 ans l’âge minimum d’accès aux centres de formation professionnelle. Objectif : passer de 500 000 stagiaires aujourd’hui à un million en 2020.

L’allongement de l’âge de la retraite comme solution contre… le vieillissement précoce

Abdeslam Seddiki a fait sourire à plusieurs reprises. Alors qu’il évoquait le nombre important des faillites d’entreprises, le ministre a assuré qu’il y en avait davantage qui naissaient, que la durée de vie de l’entreprise allait de plus en plus se réduire, et surtout que « rien n’est pérenne, tout être est voué à disparaître ».

Alors que les politiques ont pour habitude de justifier la réforme des retraites par l’allongement de l’espérance de vie et donc l’augmentation des besoins de financement des caisses de retraite, le ministre de l’Emploi a donné un argument plus… surprenant. « Quand nous avons instauré l’âge de la retraite à 60 ans, l’espérance de vie était à peine de 63 ans. Très peu de gens atteignaient l’âge de la retraite, ils mourraient avant. Aujourd’hui nous avons une espérance de vie de 78 ans. Est-ce que vous imaginez quelqu’un à 60 ans sortir à la retraite ? Personne n’a envie d’aller à la retraite à 60 ans ! ». Et d’expliquer : « Le travail libère, le travail rajeunit. Je connais pas mal de gens qui sortent du travail et qui vieillissent en quelques mois parce qu’ils ne sont plus dans l’activité, nonobstant les maladies comme Alzheimer etc. ».

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