Benkirane: "(Mon maintien) dépend de la volonté du roi et du peuple"

Dans un entretien accordé à Telquel.ma et d’autres médias, le Chef du gouvernement s’exprime (longuement) sur les sujets qui ont récemment marqué l’actualité du royaume.

Par et

Abdelilah Benkirane, chef du gouvernement.
Abdelilah Benkirane. Crédit : Yassine Toumi

Lors d’une rencontre organisée le 28 février, dans son domicile, le Chef du gouvernement s’est exprimé sur les sujets ayant marqué l’actualité récente. Une rencontre à laquelle ont participé six  médias à savoir Telquel.ma, les sites d’informations Le360, ainsi que les quotidiens Akhbar Al Yaoum et Ahdath Al Maghribia, Al Massae et Assabah .  Au menu de ces discussions, l’avenir de Benkirane au sein du secrétariat général du PJD, les élections législatives d’octobre 2016, ainsi que ses relations avec certains de ses ministres et l’opposition.

« Je me soumettrai à la volonté du parti »

Premier sujet évoqué par le Chef du gouvernement, sa situation au sein du parti de la lampe. L’actuel secrétaire général du PJD en est actuellement à son deuxième mandat à son poste, or le règlement interne ne l’autorise pas à se présenter pour un troisième mandat.

Une situation compliquée lorsque l’on sait que le PJD devra désigner son nouveau leader a l’issue de l’année 2016, mais qui ne semble pas inquiéter Benkirane outre mesure.  En effet, selon le chef de l’Exécutif deux possibilités s’offrent à lui : « Il se pourrait que le PJD organise un congrès extraordinaire qui permettrait de prolonger mon mandat ». Dans ce cas-là,  cet éventuel congrès extraordinaire aurait lieu avant les élections législatives d’octobre 2016.

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 Autre possibilité, « le règlement  du parti peut être modifié pour me permettre de briguer  un troisième mandat ».  Si cette option est choisie par le PJD, un congrés ordinaire se tiendra après les législatives. Mais, quelle que soit la décision du parti de la lampe,  le secrétaire général du parti ne souhaite pas « s’impliquer dans ce processus de modification du règlement » qui pourrait être sujette à la controverse.

« Je ne vois pas pourquoi nous ne pourrions pas finir premiers »

En plus de sa position au sein du parti, Abdelilah Benkirane a également évoqué sa position au sein du gouvernement. Le Chef du gouvernement ainsi que son parti  pourrait quitter le gouvernement a l’issue des élections législatives d’octobre 2016. À ce sujet, le chef du gouvernement a encore une fois répondu de manière détendue affirmant « qu’il ne passerait pas une minute en plus à son poste » en cas de défaite électorale insistant que son maintien à la tête de l’Exécutif dépend de la « volonté du roi et du peuple ».

Une attitude qui ne l’empêche pourtant pas de se montrer confiant quant aux performances de son parti lors du prochain  scrutin : «  Je ne vois pas pourquoi nous ne pourrions pas finir premiers aux prochaines élections. Nous avons réalisé des bons scores lors des dernières élections (régionales et communales, ndlr) ». En cas de succès du PJD, l’actuel Chef du gouvernement se voit bien rempiler pour un deuxième mandat s’il « est désigné par le roi ». Ce dernier affirme d’ailleurs que le parti de la lampe ne serait pas opposé à son maintien dans cette fonction.

Évoquant toujours les élections législatives, Benkirane a affirmé que son parti militerait pour « le maintien du seuil électoral à 6% », car une réduction de celui-ci mènerait à une « balkanisation du champ politique ». La réduction de ce seuil électorale est notamment souhaitée par certains partis de l’opposition. Le chef du gouvernement a également évoqué le vote des MRE  « Le vote des MRE est difficile à mettre en œuvre. Il est difficile de mettre en place un vote des MRE depuis l’étranger et le vote par procuration peut causer des problèmes a affirmé le Chef du gouvernement ». Il a indiqué que le gouvernement n’avait toujours pas pris de décision sur ce point.

« Belmokhtar agit comme s’il était seul au gouvernement »

Le gouvernement a justement été un autre sujet évoqué par Benkirane lors de cette rencontre. Le Chef du gouvernement s’est notamment exprimé sur la récente sortie de Salaheddine Mezouar lors du congrès national du RNI. Lors de son intervention,  l’actuel ministre des Affaires étrangères s’est désolidarisé de la politique gouvernementale en affirmant que « les récentes manifestations des mouvements contestataires (enseignants stagiaires, ndlr)   sont légitimes et explicables »  et s’était attaqué en termes à peine voilés au PJD. Une sortie au sujet de laquelle, le président du RNI s’est expliqué lors d’une conversation avec le chef du gouvernement : « Il (Mezouar,ndlr)  estime qu’il y’a eu une incompréhension. Et que ces propos ont été mal interprétés »  a déclaré Benkirane.

Une affaire oubliée donc pour Benkirane qui n’a toutefois pas manqué de critiquer son ministre de l’Éducation nationale, Rachid Belmokhtar, qu’il avait ouvertement attaqué au parlement pour sa volonté de reformer la langue d’enseignement. « Belmokhtar agit comme s’il était seul au gouvernement et ne me consulte pas notamment sur le sujet de la langue d’enseignement.  Il avait tort » a dénoncé le Chef du gouvernement. Benkirane estime également que son ministre a fui ses responsabilités concernant le sujet des enseignants stagiaires. « La promotion des enseignants stagiaires en deux groupes est une idée proposée par le ministère de l’Intérieur que je dois la défendre en tant que Chef du gouvernement. Le problème dans ce dossier est que Belmokhtar ne veut pas assumer ses responsabilités. Je dois gérer ce problème à sa place » affirme Benkirane.

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« 2M agit comme un acteur politique »

En plus des récentes manifestations des enseignants stagiaires, un autre sujet a fait l’objet de contestation récemment, celui de la réforme des retraites. Une réforme qui a suscité de vives contestations qui se sont concrétisées à travers une grève nationale ayant eu lieu le 24 février. Un mécontentement qui suscite une réaction mitigée du Chef du gouvernement : «  L’essentiel est que les syndicats aient le droit de faire grève. Mais je ne comprends pas pourquoi cette grève a eu lieu, car je communique pourtant avec eux ».

Mais, pour le chef de l’Exécutif, le plus grand problème qui ressort de cette contestation est son traitement par la chaîne de télévision 2M : « 2M agit comme un acteur politique et non comme une chaîne publique et ce an affirmant clairement qu’elle est du côté des syndicalistes et de la grève générale »  a déclaré le chef du gouvernement qui estime que la position de la chaîne d’Ain Sebaa vis-a-vis du gouvernement est « connue de tous ». On rappellera que les conflits entre Abdelilah Benkirane et la directrice de l’information de la chaîne sont nombreux et documentés.

« Le PAM est prêt à recourir à la violence »

Dernier sujet évoqué par Abdelilah Benkirane lors de cet entretien, l’opposition. Le Chef du gouvernement a notamment tenu à s’exprimer au sujet du PAM et du conflit entre celui-ci et sa formation au Conseil de la ville de Rabat dont l’une des réunions s’est conclue par une bagarre généralisée entre les représentants des deux partis. « Ce qui est arrivé a la mairie de Rabat, prouve que le PAM est prêt à recourir à la violence. Je ne voulais pas les provoquer, mais ce qui s’est passé à Rabat m’a fait changer d’avis. Nous montrerons que nous savons nous défendre ».

Le Chef de l’Exécutif n’a également pas raté l’occasion d’évoquer le cas du secrétaire général du parti de l’Istiqlal, Hamid Chabat, qui s’est récemment retiré de l’opposition pour afficher un «  soutien critique » au gouvernement. « Chabat a fait de bonnes manœuvres que je n’aurais pas été capable de faire s’il m’était arrivé la même chose que lui. Je dirai juste qu’il doit faire attention à ses changements de position ».

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