Aïcha Echenna traitée d'« icône de la débauche » par l'islamiste Hammad Kabbadj, vraiment ?

Aïcha Echenna n’a pas vu les propos la traitant d'« icône de la débauche » attribués à Hammad Kabbadj à son encontre. Ce dernier dément d'ailleurs.

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Aicha Echenna © Yassine Toumi / TELQUEL

Les soutiens à Aïcha Echenna, présidente-fondatrice de l’association « Solidarité féminine », se multiplient sur les réseaux sociaux, alors que l’association « Touche pas à mon enfant » accuse Hammad Kabbadj, candidat PJD à Marrakech, d’avoir « pris pour cible les mères célibataires, notamment leur défenderesse Aïcha Echenna », selon un communiqué de Najat Anwar, présidente de « Touche pas à mon enfant ».

« Icônes de la débauche », « marraine des prostituées et de toutes les dépravées du pays », voici un florilège des propos rapportés par la presse, ici et , attribués à Hammad Kabbadj à l’encontre d’Aïcha Echenna. Impossible d’en trouver la trace sur le site du candidat PJD, ni sur sa page Facebook. Ce dernier a réagit le 15 septembre sur sa page Facebook :  « Je me pose la question autant que tous les marocains sur l’origine de ces propos?! Nous savons tous que les femmes célibataires sont une catégorie sociale qui a besoin de soins, de suivi et d’assistance. Nous ne pouvons pas systématiquement associer cette assistance à un cautionnement des éventuelles erreurs de ces femmes par le passé, surtout que beaucoup de ces femmes n’ont tout simplement pas fait d’erreur ni choisi leur situation, ayant été victimes de violences notamment. A ce titre, je démens formellement les propos qui me sont attribués et invite ceux qui les relaient à nous présenter leurs sources.»

Le communiqué de « Touche pas à mon enfant », indisponible en ligne, assure pourtant que l’association « a suivi de près les tergiversations du dénommé Kabbadj », mais ne donne pas de citations exactes ni de date pour ces propos. Contactée par Telquel.ma, Najat Anwar est également restée injoignable. Nos questions envoyées par mail, demandant notamment des preuves des propos tenus par Kabbadj, demeurent pour l’heure sans réponse.

« Au PJD, j’ai droit aux salamalecs »

La principale concernée, Aïcha Echenna n’a pas non plus vu ces insultes. « Les associations “Touche pas à mon enfant” et “Oum El Banine” m’ont appelé la semaine dernière pour me dire qu’elles avaient lu sur le site de Kabbadj des insultes à mon encontre ainsi qu’un appel à voter Benkirane, “le seul à pouvoir combattre mon action” », raconte la militante récemment honorée pour ses 58 ans de combat, lors de la 12e édition du Festival international de la culture amazighe. « Elles voulaient que je signe avec elles un communiqué en réaction, mais j’ai refusé. Je ne l’ai pas vu de mes propres yeux ni entendu de mes propres oreilles. Et puis je ne sais même pas comment fonctionne Internet » poursuit la dame de 75 ans.

« C’est alors que me sont revenues à l’esprit les attaques que j’avais subies, avec d’autres, en 2000, au moment du mouvement de l’intégration de la femme dans le développement. C’était du même ordre. Pour eux, défendre les mères célibataires, c’était encourager la prostitution. J’étais furieuse. À l’époque, Nadia Ziane et Christine Serfati m’avaient convaincue de ne pas répondre, pour ne pas entretenir le buzz, », se rappelle-t-elle, en listant les innombrables prix nationaux et internationaux qu’elle a reçus pour son action. Serait-ce une affaire vieille de quinze ans ? Pourquoi remonte-t-elle à la surface maintenant ?

« Je ne vais pas vous mentir, ça me touche ces insultes. Je trouve surtout qu’il y a une hypocrisie extraordinaire, parce que quand je rencontre les gens du PJD, j’ai droit aux accolades et aux salamalecs. Là, ils ne réagissent pas », constate Aïcha Echenna. « Ça ne me dérange même pas que ce monsieur fasse campagne pour le PJD, mais qu’il ne le fasse sur le dos de ceux qui sont exclus, parce que moi je travaille à mettre de l’ordre là-dedans », précise-t-elle.

Continuer le combat

« Ma réponse à ces gens-là, c’est de défendre la cause des plus démunis. Benkirane et les précédents chefs du gouvernement n’ont rien fait pour ça. Ils ont mis les enfants abandonnés dans la rue à 18 ans. De sang-froid, ils les mettent à la rue. J’ai honte pour ma société, pour l’humanité dans mon pays, quand je vois ça » poursuit Aïcha Echenna.

« Hier, on m’a proposé de mettre sur mon site les réactions des gens qui me soutiennent sur Facebook. J’ai dit non. J’essaye de rester sage et tranquille pour ne pas masquer mon combat par cette polémique. Je continue ma lutte contre l’exclusion et pour appliquer les politiques dont le gouvernement ne veut pas, sur l’éducation sexuelle, notamment. Ils ont peur qu’on ressemble aux peuples occidentaux. C’est faux. Il y a tout ce qu’il faut dans l’éducation coranique pour l’éducation sexuelle. C’est essentiel pour préserver les jeunes gens des maladies, des grossesses. Sans ça, ils se retrouvent seuls, face au mur », conclut-elle, sans mauvais jeu de mots.

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