« La première fois que je suis venu au Maroc, j’ai appris le cas de Français qui ont dû partir, car ils n’avaient plus de visa et ont été licenciés du jour au lendemain« , se souvient le sénateur français de droite (UDI) Olivier Cadic, qui travaille depuis trois ans sur l’amélioration du cadre juridique du contrat de travail d’étranger (CTE) au Maroc. Un sujet aussi porté par le Parti socialiste et la République en Marche.
« La corrélation entre le visa et le contrat de travail laisse les travailleurs étrangers dans la précarité. Ils peuvent être licenciés du jour au lendemain, sans avoir d’indemnités puisque l’ancienneté n’est pas reconnue« , explique le sénateur qui a eu affaire à plusieurs cas, notamment celui de l’élu consulaire de Fès.
Ce dernier est, selon lui, sur le point de devoir partir du Maroc alors qu’il a un contrat en règle. Le problème: la jurisprudence marocaine ne permet pas aux travailleurs étrangers de bénéficier du CDI, faisant de la préférence nationale une priorité. Ce problème est principalement français puisque plus de 25% des salariés étrangers ayant l’autorisation du ministère viennent de l’Hexagone.
Si les autorités marocaines ont été « très sensibles et à l’écoute de cette question » selon le sénateur Olivier Cadic, il précise que « des efforts » restent à fournir. En février 2017 s’est tenue une réunion à Rabat entre les ministres de l’Emploi et des Affaires sociales du Maroc, et leurs homologues français à ce sujet.
À l’issue de la rencontre, une « note relative à la révision de la procédure d’octroi des visas des contrats de travail d’étranger » a été publiée. Objectif: mettre fin à « toute discrimination à l’égard des étrangers en contrat à durée indéterminée« , rappelle Olivier Cadic dans sa question écrite, publiée dans le journal officiel du sénat français. Il demande alors la publication d’un « arrêté ministériel pour que l’ancienneté du salarié soit prise en compte dans le visa« .
Blocage en Cassation
Selon lui, le problème réside dans le fait que la Cour de cassation marocaine considère que la durée du visa est égale à la durée du contrat de travail. « Puisqu’un visa est une autorité administrative au Maroc qui ne peut avoir une durée indéterminée« , un salarié français ou étranger ne peut pas signer de véritable CDI, contrairement à un Marocain, critique le sénateur. C’est là que réside la discrimination qui va à l’encontre de l’accord d’association UE-Maroc de 1996.
Le 9 novembre, le ministère français de l’Europe et des Affaires étrangères a répondu à ces préoccupations. Il a dressé un bilan des échanges qui ont eu lieu entre les administrations marocaines et françaises pour régler ce problème de CTE, expliquant notamment avoir mis en place une application en ligne, « Taechir ».
Cette dernière est destinée aux employeurs faisant appel à des travailleurs étrangers. « Ce service en ligne facilite et simplifie les démarches, et réduit les délais pour les employeurs qui peuvent suivre le traitement des demandes en temps réel« , note le ministère dans sa réponse.
« Un projet d’arrêté est en cours de finalisation par les services marocains« , explique cette même note, afin de permettre d' »atténuer l’impact de la jurisprudence marocaine en permettant aux tribunaux de prendre en compte la succession des CDD pour calculer les indemnités du salarié« .
La balle est dans le camp de la Cour de cassation qui a le pouvoir d’infléchir la jurisprudence, mais la balle est aussi dans le camp des législateurs qui pourraient prendre « une mesure législative dans le cadre d’une réforme du Code du travail« . Le ministère français estime que cette dernière possibilité est peu probable étant donné le « dialogue social compliqué à mener en l’état du marché du travail local et du chômage« .
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