« C’est une grande satisfaction pour nous que le Maroc ne figure pas sur cette liste noire, car ça aurait été préjudiciable avec des conséquences néfastes sur nos relations avec l’UE, sur l’image du pays à l’international« , nous déclare une source autorisée au ministère des Finances.
Mohammed Boussaid, ministre des Finances (MEF), et Nasser Bourita, ministre des Affaires étrangères (MAE), étaient sur le pied de guerre au cours des cinq derniers jours pour sortir le Maroc de cette liste noire des paradis fiscaux adoptée, ce mardi.
Depuis quelques mois, les ministres des Finances de l’Union européenne (UE) ont mandaté les experts nationaux du groupe « code de conduite » pour passer en revue les régimes fiscaux de tous les pays partenaires parmi lesquels figure, bien évidemment, le Maroc.
Selon nos sources, le Royaume a été alerté en juin dernier et informé de la visite des experts qui finalement ne se sont pas présentés. Ils ont adressé au Maroc un questionnaire qui a été renvoyé le 23 octobre dernier. L’évaluation des experts tombe au cours du mois de novembre. « Ils ont estimé que notre fiscalité comportait des régimes dérogatoires« , explique notre source au MEF.
Dans le collimateur de ces experts, les régimes dédiés aux zones franches, les incitations fiscales aux exportateurs et même le hub Casablanca Finance City. Malgré les explications données, les experts décident lors de leur réunion du 27 novembre dernier que le Maroc est un paradis fiscal. La liste n’allait être officielle que ce mardi 5 décembre après l’adoption des ministres des Finances de l’UE.
« Nous avons appris qu’il y aurait cette réunion des ministres des Finances de l’UE et que le Maroc figurait sur la liste noire. Nous nous sommes donc mobilisés et nous avons agi ces cinq derniers jours avec beaucoup de pression à la fois auprès des ministres, de la commission de l’UE et du conseil de l’UE pour exposer notre point de vue« , révèle notre interlocuteur.
Tout en insistant sur le fait que le « Maroc n’est pas un paradis fiscal et qu’il n’a pas de régime dérogatoire dommageable pour l’économie européenne », Boussaid et Bourita ont répondu favorablement à la demande de l’UE sur deux gages consacrant la bonne volonté du Royaume.
Le premier est la ratification de la Convention multilatérale de l’OCDE et du Conseil de l’Europe concernant l’assistance administrative mutuelle en matière fiscale. Il s’agit d’une convention qui permet de mettre en place toutes les formes d’échange de renseignements fiscaux et l’assistance au recouvrement des créances fiscales. « Elle a été adoptée par le parlement marocain, sa ratification ne posera pas de problème », assure notre interlocuteur.
Le second gage concerne « l’adoption partielle des standards du BEPS (Érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices)« . Selon le site de l’OCDE, un cadre inclusif sur le BEPS a été créé en janvier 2016 « de manière à ce que tous les pays et juridictions travaillent ensemble. Plus de 90 pays et juridictions ont adhéré au cadre inclusif sur un pied d’égalité dans le développement de normes concernant les questions relatives au BEPS tout en veillant à leur mise en œuvre de manière cohérente ».
Le Maroc a accepté, car de toute façon « il n’y a pas de mesures nouvelles. Nous avons réaffirmé les engagements qui étaient déjà pris par le Maroc« , insiste-t-on auprès du ministère des Finances.
Il reste une troisième demande à laquelle le Maroc n’a pas accédé, à en croire notre source. « Ils ont demandé le redressement des régimes fiscaux », confie notre interlocuteur. « Il est hors de question de redresser quoi que ce soit sans comprendre de quoi il s’agit« .
Les Européens visent notamment « les régimes fiscaux dédiés aux exportateurs, les centres de coordination, des zones offshores dont le Maroc conteste l’existence« . Sur ce point les ministres des Finances et des Affaires étrangères ont rappelé le statut avancé du Maroc avec l’UE et l’Accord de libre-échange (ALE) qui les lie et qui cause un déficit de 6 milliards d’euros. « Il est donc tout à fait normal que le Maroc adopte une politique d’encouragement des exportations à l’instar de tous les autres pays« , conclut notre source.
Le Maroc a obtenu gain de cause en si peu de temps alors que plusieurs autres pays ont formulé des engagements sans pour autant arriver à s’extraire de la liste noire de l’UE.
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