La possible candidature de femmes au concours de recrutement d'adouls fait débat

Le concours mixte de recrutement des adouls, annoncé en juillet dernier par le ministre de la Justice, a été reporté. La question de l’ouverture de la profession aux femmes fait polémique au sein de la profession.

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En 2018, l’annonce de l’ouverture du métier d’adoul aux femmes avait suscité quelques levées de boucliers parmi les membres les plus conservateurs de la profession. Crédit: DR

L’ouverture du métier d’adoul aux femmes fait débat au sein de la profession. En juillet dernier, le ministre de la Justice, Mohamed Aujjar, avait lancé un concours pour le recrutement de 700 adouls qui devait être ouvert aux hommes et aux femmes. Une première au Maroc.

Suite à des débats en interne entre le ministre de la Justice et l’Ordre des adouls, le dit concours n’a pas eu lieu et a finalement été reporté à une date encore indéterminée, nous explique une source au sein de la Direction des affaires civiles dont dépend le bureau du chef des adouls en charge de l’organisation de l’examen. Toujours selon la même source, le ministre de la Justice aurait également fait appel au cabinet royal pour trancher sur la participation féminine au concours.

Pourtant, le président de l’Ordre national des adouls, Mohamed Sassioui, déclarait à TelQuel en juillet dernier que son instance n’était « en principe pas opposée à l’exercice de la profession par des femmes« , soulignant qu’elle est « sous la tutelle du ministère de la Justice, qui est en mesure de prendre des décisions« .

Interprétation juridique et coutumes sociales

En effet, la loi marocaine n’interdit pas aux femmes d’exercer cette fonction. L’article 4 de la loi 16-03 promulguée en novembre 2008 ne prévoit pas la masculinité comme critère de la profession.

Les détracteurs de l’entrée des femmes dans la fonction se basent, eux, sur une ancienne interprétation du verset 282 de la sourate Al Baqara : « Faites-en témoigner par deux témoins d’entre vos hommes; et à défaut de deux hommes, un homme et deux femmes d’entre ceux que vous agréez comme témoins, en sorte que si l’une d’elles s’égare, l’autre puisse lui rappeler« .

Or, selon Asma Lamrabet, médecin biologiste, essayiste et féministe musulmane marocaine, « il n’y a aucun texte, ni au sein du Coran ni dans le Hadith, qui interdise cette fonction aux femmes ». Pour celle qui défend le droit des femmes dans l’islam, « comme dans toute la lecture patriarcale traditionaliste majoritaire, c’est un interdit qui est le produit de l’imbrication entre l’interprétation juridique (Fiqh) et les coutumes sociales (ada et urf) qui ont fini par être assimilées comme relevant du sacré« .

Asma Lamrabet rappelle également que « dans les premiers temps de l’islam cette fonction n’était pas interdite puisqu’Aicha, épouse du prophète, a elle-même marié ses nièces! Ce sont des évènements que l’on retrouve dans les compilations historiques islamiques« . Pour elle, rien n’interdit cette fonction aujourd’hui sinon « des mentalités forgées par des siècles de tradition sclérosée« .

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