Le Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE), première formation d’opposition a déposé une motion de censure, dans la matinée, à la Chambre des députés pour renverser Mariano Rajoy dans le but de former un gouvernement à sa place.
Pour aboutir, cette motion devra être votée par 176 députés. Une majorité absolue que le PSOE ne pourrait rassembler qu’en s’alliant à la gauche radicale de Podemos et aux petits partis nationalistes (dont les séparatistes catalans), contre lesquels le numéro un des socialistes, Pedro Sanchez, a pris position ces derniers mois.
Le Ciudadanos s’oppose
Le parti libéral Ciudadanos, devenu le principal rival de Mariano Rajoy d’après les sondages, lui a immédiatement annoncé qu’il s’opposerait à cette motion de censure mais exigé en revanche la tenue d’élections anticipées. « La condamnation du gouvernement pour corruption a mis un terme à la législature », a lancé dans un tweet le chef de Ciudadanos, Albert Rivera.
Et d’ajouter : « Nous avons besoin d’un gouvernement propre et fort qui affronte le défi séparatiste. Ou Rajoy convoque des élections ou le Congrès le fera ». Ciudadanos n’a pas pour autant l’intention de faciliter l’arrivée des socialistes au pouvoir.
« La motion présentée par M. Sanchez, avec nous le supposons l’appui de populistes et de séparatistes, n’est pas la motion de Ciudadanos. Nous allons nous y opposer », a prévenu le secrétaire général du parti, José Manuel Villegas.
Cette crise politique à Madrid intervient au lendemain de la publication par la justice d’un arrêt concluant à un financement illicite du Parti Populaire de M. Rajoy dans un méga-procès pour corruption.
Selon cet arrêt de l’Audience nationale, le PP a bénéficié d’un vaste système de pots-de-vin contre des marchés publics dans plusieurs municipalités. Ce tribunal compétent notamment pour les affaires de corruption, a également conclu à l’existence d’une « caisse noire » pourtant niée par les dirigeants du PP.
« Coup de massue »
« Sentence dévastatrice », titrait vendredi le journal catalan El Periodico, tandis que El Pais, écrivait dans un éditorial que « ce coup de massue, sans précédent dans l’Espagne démocratique porte atteinte à la crédibilité du parti qui a gouverné le pays de 1996 à 2004 et depuis 2011 jusqu’à aujourd’hui ». La condamnation du PP a provoqué « l’indignation (…) et nuit à la réputation de l’Espagne », a affirmé M. Sanchez. « La situation de crise institutionnelle, de perte de confiance d’une partie de l’opinion publique pour ses gouvernants, n’a qu’un seul responsable, et il s’appelle Mariano Rajoy », a-t-il ajouté.
Le patron du PSOE a également assuré que s’il parvenait au pouvoir à la faveur de cette motion de censure, son gouvernement « nettoierait les institutions publiques de la corruption ».
Selon Antonio Barroso, analyste au cabinet Teneo Intelligence, la réussite de de cette motion de censure reste toutefois « improbable (20% de chances), les partis d’opposition étant incapables de se coordonner pour renverser Rajoy ». Il n’empêche, à la Bourse de Madrid, l’annonce combinée de cette motion de censure et de la position de Ciudadanos a entraîné une chute de l’indice vedette Ibex 35 qui lâchait 1,95 % vers 11H00 GMT.
245.492 euros à rembourser
Jeudi 24 mai, le PP a immédiatement annoncé qu’il ferait appel de la décision de l’Audience nationale, qui le condamne à rembourser plus de 245.492 € pour avoir participé « à titre lucratif » à ce système tentaculaire. Il a soutenu que le parti n’était pas au courant des opérations de ses membres, d’ailleurs écartés de ses rangs depuis des années.
Au total vingt-neuf accusés ont été condamnés à 351 ans de prison, dont l’ancien trésorier du parti Luis Barcenas, condamné à 33 ans de prison et à une amende de 44 millions d’euros pour avoir détourné et dissimulé une fortune en Suisse.
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