Après une semaine de protestations à travers la France, qui ont fait deux morts et des centaines de blessés, le mouvement reste largement soutenu par les Français : selon un sondage BVA, ils sont 72% à approuver les revendications des “gilets jaunes”, notamment excédés par la hausse d’une taxe écologique qui a amplifié la flambée des prix des carburants.
Le mode d’action des gilets jaunes divise cependant (52% des Français sont contre, 46% pour). Le mouvement, apolitique et asyndical, reste un véritable défi pour le président Emmanuel Macron, qui a déjà essuyé de nombreuses manifestations de mécontentement face à son ambitieux programme de “transformation” de la France, sans pour autant revenir sur le rythme de ses réformes.
Jeudi soir, la présidence française a annoncé que le chef de l’Etat donnerait mardi “le cap pour la transition écologique“. “Nous avons reçu le message des citoyens. (…) Pour qu’elle ne soit pas socialement inacceptable, il faut que la transition écologique, qui est nécessaire, soit juste, équitable et démocratique“, a fait valoir la présidence.
Vendredi, la présidente de la commission des Affaires sociales de l’Assemblée nationale, Brigitte Bourguignon (majorité présidentielle), a appelé à “un moratoire” sur les hausses de taxes sur les carburants afin de nouer le dialogue “dans un climat apaisé“.
De rares “gilets jaunes” étaient présents au petit matin porte Maillot, dans l’ouest de Paris, a constaté une journaliste de l’AFP. “Le gouvernement a tout fait pour diaboliser le mouvement qui va se dérouler sur Paris“, déplore Clément Jonie. “On entend les députés LREM (le parti présidentiel) dirent “on va tenir le cap” mais le mouvement est en route, il n’est pas prêt de s’arrêter“, assure ce logisticien de 47 ans habitant en banlieue.
Mais ces tentatives n’ont pas apaisé les “gilets jaunes“, ainsi baptisés en raison des vestes fluorescentes que chaque automobiliste doit détenir en cas d’accident. Ils espèrent ce samedi rassembler une nouvelle “marée jaune” après les premières actions de samedi dernier sur les routes de France qui avaient réuni 282.000 personnes selon le ministère de l’Intérieur.
L’appel à un “acte 2” à Paris a été lancé sur les réseaux sociaux, canal principal de cette contestation mais, comme le week-end dernier, quasiment aucun rassemblement n’a été déclaré. Plus de 35.000 personnes se sont toutefois dites prêtes sur Facebook à participer à un grand rendez-vous place de la Concorde, interdit par les autorités en raison de la proximité du palais présidentiel.
Un large périmètre a été bouclé dès l’aube autour de l’Élysée, la partie basse des Champs-Elysées, la Concorde, l’Assemblée nationale ainsi que de l’hôtel Matignon, qui abrite les bureaux du Premier ministre. “Sur ce territoire, aucune manifestation, aucun rassemblement, aucun cortège en lien avec les “gilets jaunes” ne pourra se dérouler“, a prévenu le préfet de police M. Delpuech.
Des centaines de “gilets jaunes” avaient réussi à s’approcher de l’Elysée samedi dernier, semant la confusion. “J’en appelle à la responsabilité des organisateurs“, a exhorté vendredi soir le ministre de l’Intérieur, Christophe Castaner. En outre, “un dispositif mobile“, guidé notamment par des hélicoptères, sera prêt à intervenir sur de possibles “violences, voire exactions” dans Paris et “tentatives de blocages” du périphérique, selon M. Delpuech
Les autorités ont en revanche donné leur feu vert à un rassemblement dans le parc du Champ-de-Mars, au pied de la Tour Eiffel, une hypothèse rejetée par plusieurs animateurs du mouvement.
Un communiqué “destiné à la Préfecture de police“, signé “Les citoyens français” et posté sur les réseaux sociaux, appelle plutôt à une action dans le “quartier des Champs-Elysées“. La présidente du Rassemblement national (extrême droite), Marine Le Pen, a elle aussi suggéré un rassemblement sur la grande artère parisienne.
Le chef de file du parti de gauche radicale La France insoumise, Jean-Luc Mélenchon, a prédit une “mobilisation énorme“, assurant qu’il se passait “vraiment quelque chose en profondeur dans le pays“. Les autorités sont sur le qui-vive. “Nous savons aussi que des réseaux violents d’ultradroite et d’ultragauche entendent se mobiliser“, a prévenu le ministre de l’Intérieur.