En Afrique, la Société générale se réinvente pour atteindre ses objectifs de croissance

Digital, soutien aux PME, laboratoires d’innovations... La Société générale a dévoilé le programme de son plan d'actions "Grow with Africa" qui a pour but de renforcer la présence du groupe en Afrique et d'atteindre un taux de croissance moyen de ses revenus de 8%.

Par

SGMB. Crédit DR

Le groupe Société générale fait peau neuve sur le continent. Ancrée en Afrique depuis plus de 100 ans, la banque française opère aujourd’hui dans 19 pays. Notamment présente au Maroc, au Bénin, en Tunisie, au Kenya, au Sénégal ou en Côte d’Ivoire, le groupe dispose d’environ 1.000 agences, collabore avec plus de 11.500 partenaires et sert 4,1 millions de clients, dont 150.000 entreprises.

Si la présence historique de la Société générale sur le territoire fait d’elle un acteur notable dans le secteur, elle est actuellement confrontée à une forte concurrence, tant panafricaine qu’internationale – BMCE, Attijariwafa Bank, BNP… – qui la pousse à se réinventer et à se mobiliser autour d’un défi, celui de « contribuer de façon responsable et durable à la croissance africaine », a fait savoir Frédéric Oudéa, le directeur général du groupe, les 29 et 30 novembre à Dakar.

A l’occasion d’une conférence de presse, Frédéric Oudéa a dévoilé le lancement et les ambitions du nouveau programme de croissance de la Société générale en Afrique : « Grow with Africa ». S’inscrivant dans la lignée du plan stratégique « Transform to Grow », « Grow with Africa » vise à dynamiser les activités africaines du groupe pour atteindre un « taux de croissance moyen des revenus de 8% par an et une rentabilité supérieure à 15% d’ici à 2020 ». A noter que l’Afrique représente actuellement 5% des revenus de la Société générale.

Modèles alternatifs et politique inclusive 

Pour ce faire, la banque de « l’affaire Kerviel », compte mettre l’accent sur quatre volets de développement. A savoir : l’accompagnement multi-dimensionnel des PME africaines, le renforcement de son financement dédié aux infrastructures, la mise en place de solutions de financements innovantes, ainsi que le soutien au développement des populations par l’inclusion financière. De quoi, selon le dirigeant, éviter « la tentation de recroquevillement sur l’Europe » – où le groupe a cédé deux de ses filiales en août dernier (bulgare et albanaise) à la banque hongroise OTP.

Considérant l’Afrique comme un continent de croissance et d’opportunités, en admettant toutefois que rien n’y est « tout rose », la banque rouge et noire compte faire la part belle au digital et à l’innovation pour atteindre ses objectifs et y renforcer sa présence. 

Sur un territoire où plus de 80% de la population sont non bancarisés, où le taux de pénétration de la téléphonie mobile s’élève à 28% en Afrique de l’Ouest, et à 51% en Afrique de l’Est (source GSMA), la création de modèles bancaires alternatifs et inclusifs, à l’image de Manko et YUP, s’est imposée au groupe de manière évidente.

« Les Africains, par leur façon de consommer les produits et les services bancaires via l’offre mobile, sont en train de réinventer la banque de demain. Ignorer ce comportement, serait se tirer une balle dans le pied », a estimé Alexandre Maymat, responsable Afrique, Méditerranée et Outre-mer.

YUP, le porte-monnaie virtuel

Lancé en 2017 par le groupe, YUP est un portefeuille numérique via lequel les usagers (bancarisés ou non, clients de la Société générale ou non) peuvent réaliser des dépôts ou des retraits d’argent, payer des factures, recevoir un salaire ou encore effectuer des transferts domestiques… Cela, non pas dans une banque, mais directement auprès d’agents partenaires équipés de terminal de paiement électronique (TPE) adaptés (stations services, commerces, réseaux marchands…).

Concrètement, après avoir créer un compte YUP, l’utilisateur se rend chez un agent distributeur pour réaliser l’action souhaitée (retrait, dépôt, transfert…). Que ça soit sur son GSM ou sur son smartphone – par le biais de l’application mobile – le client YUP reçoit ensuite un appel qui, grâce à l’émission d’un son reconnu par le TPE, rendra le service bancaire choisi effectif.

Estimant ne pas être « en concurrence avec les opérateurs mobiles – Orange et MTN Group – leaders sur le contient », mais considérant que « le cash » est leur principal rival, Alexandre Maymat a fait savoir que d’autres fonctionnalités étaient en cours de développement. A savoir, des services plus bancaires comme le microcrédit, ou des options plus lucratives, telles qu’une bibliothèque musicale et de lecture.

Déployé au Cameroun, en Côté d’Ivoire, au Sénégal et au Burkina Faso, YUP dispose aujourd’hui de 300.000 portefeuilles, de 5.000 agents et réalise 3.000 transactions par jour. En 2019, la Société générale ambitionne de développer YUP dans huit pays autres africains – parmi lesquels le Maroc ne fait pas parti, en raison du « cadre réglementaire qui ne le permet pas », explique le responsable Afrique, Méditerranée et Outre-mer.

Chouchouter les PME et l’innovation 

Dans la philosophie de la Société générale, s’inscrire dans une démarche d’innovation va de paire avec l’accompagnement et le conseil aux jeunes créateurs porteurs projets, soit les PME. Acteur incontournable de l’économie africaine (90% des sociétés privées du continent, étude Groupe cofina), la PME constitue le cœur cible du groupe dans sa stratégie de développement.

En témoigne le volet du plan « Grow with Africa » : « L’accompagnement multi-dimensionnel PME africaines », qui prévoit notamment l’augmentation de 4 milliards d’euros des encours de crédits aux PME africaines dans les cinq prochaines années. En ce sens, le groupe entend créer des « Maisons PME » dans chacune de ses filiales à travers le continent.

Le concept de cette initiative ? Proposer aux entrepreneurs un processus de suivi, d’accompagnement, de conseil ainsi que de formation (e-learning par exemple) pour accroître le potentiel de leur entreprise, le tout dans un lieu dédié. L’Agence française de développement, Proparco, BPI France, ou encore l’Agence de développement et d’encadrement des petites et moyennes entreprises (ADEPME), font partie des 17 partenaires de la Société générale dans ce projet.

« Quand on sait que 97% des entreprises sénégalaises (étude de l’Agence nationale de la statistique et de la démographie, ndlr) sont des très petites entreprises, mais que le taux d’acceptation des financements par les banques est de 16%, et le taux de rejet de 72%, il est nécessaire d’apporter une réponse concrète aux problématiques de suivi et de financements de ces PME », a exprimé le secrétaire général du ministère du Commerce au Sénégal en charge des PME lors de l’inauguration, le 29 novembre à Dakar, de la « Maison de la PME » dans les locaux de la filiale sénégalaise du groupe.

Même état d’esprit, autre initiative : le Lab Innovation Afrique. Ce « laboratoire d’idées », présent à Dakar et à Tunis depuis 2017, a pour mission de stimuler et de développer les initiatives innovantes des filiales africaine de la Société générale. Lieu de mise en relation et de co-construction, le Lab est en contact avec des start-ups, des développeurs, des futurs chefs d’entreprise ou des étudiants dans le but « d’impulser une dynamique d’open innovation chez les collaborateurs africains du groupe », a indiqué la communication.

Après l’ouverture des portes, en août dernier, de la Digital Factory à Casablanca au sein de sa filiale Société générale african business services (SGABS), début 2019 le groupe lancera au même endroit son Lab Hack, espace réunissant cinq experts aux profils différents pour penser les projets digitaux innovants de demain.