Épidémies : l’Algérie doit ménager la chèvre et le bœuf 

Alors que la peste des petits ruminants touchant chèvres et moutons continue de se propager, le nombre de vaches porteuses du virus de la fièvre aphteuse ne cesse d’augmenter sur le territoire algérien. Au Maroc, l’ONSSA se veut rassurante.

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un homme allongé à côté de moutons
Image d'illustration Crédit: Yassine Toumi/TelQuel

Le ministère algérien de l’Agriculture est sous pression. Une épidémie de peste des petits ruminants (PPR) dévaste actuellement les troupeaux de chèvres et de moutons du pays. Cette maladie se caractérise par son extrême contagion. Elle peut affecter jusqu’à 90 % d’un troupeau d’ovins et tuer 70 % des animaux infectés. Le virus se transmet par trois voies : les sécrétions nasales, l’expectoration (toux et éternuements) et les matières fécales. Les troupeaux se déplaçant et entrant en contact les uns avec les autres, le risque de propagation dans la région est à redouter. Considérée un temps comme éradiqué, la PPR menacerait aujourd’hui huit millions d’ovins en Algérie.

En 2008, le Maroc avait connu une crise semblable. L’épidémie avait pu être maîtrisée en quelques mois. Les instances sanitaires avaient ensuite développé un vaccin spécifique au niveau local, et grâce à de vastes campagnes de vaccination en 2011, le virus a été éradiqué du territoire national. Depuis plusieurs semaines, c’est en Algérie que le PPR est réapparue, causant la mort de plus de 2000 chèvres et moutons selon le gouvernement algérien. Pour juguler la crise, les autorités ont fait fermer les marchés de bétail du pays, et ont émis l’interdiction de transporter des ovins sans autorisation officielle.

Mais les foyers d’infection continuent de se multiplier sur tout le territoire. Alors que les premières contaminations semblaient provenir de la région de Bejaïa, dans le nord du pays, les cas de PPR ont récemment été observés dans la région limitrophe de la Tunisie ainsi qu’à Tlemcen, tout près de la frontière marocaine. Les éleveurs algériens font ce qu’ils peuvent pour enrayer la propagation de la peste, à savoir brûler les carcasses des animaux morts du virus et séparer les individus malades du reste du troupeau. Mais ceux-ci attendent maintenant du gouvernement qu’il leur fournisse des vaccins pour immuniser les animaux bien portants. Le ministère algérien de l’Agriculture assure quant à lui avoir « mobilisé un budget de 400 millions de dinars pour l’acquisition du vaccin contre la peste des petits ruminants ». Ceux-ci devraient être livrés aux éleveurs à la fin du mois.

Les bovins menacés par la fièvre aphteuse

Dans l’attente du remède, l’épidémie continue de se propager à une vitesse éclair, et de nouveaux foyers touchés par la maladie sont découverts tous les jours. Sur place, les professionnels du secteur appellent à contrôler de toute urgence le déplacement des animaux. Aucune initiative coordonnée n’a pour le moment été observée sur le terrain. La situation menace pourtant d’empirer, avec l’ouverture d’un deuxième front de bataille sanitaire. En effet, parallèlement à l’épidémie de PPR, 87 foyers de fièvre aphteuse, maladie touchant surtout les bovins, ont récemment été découverts sur le territoire algérien selon l’Organisation mondiale de la santé animale.

Le mal n’est pas nouveau en Algérie. On estime même qu’un tiers environ du cheptel national de bovins a été décimé au cours des quatre dernières années. Les conséquences économiques de cette nouvelle poussée de fièvre aphteuse pourraient s’avérer désastreuses. La maladie, rendant l’animal impropre à la consommation, a déjà provoqué une flambée des prix de la viande rouge sur les marchés. Le ministère algérien de l’Agriculture a pourtant assuré aux éleveurs ayant perdu des têtes dans les deux épidémies qu’ils seront indemnisés, même dans le cas où leur troupeau n’était pas assuré contre les maladies.

Pris en étau, le gouvernement algérien va devoir être en même temps sur les deux fronts, ovins et bovins, s’il ne veut que la situation lui échappe. Les répercussions, de locales, deviendraient nationales ; et si la crise perdurait, alors la catastrophe serait régionale.

Au Maroc, « des mesures de lutte ont été prises pour éviter tout risque de propagation de la fièvre aphteuse dont la présence a été confirmée dans une exploitation à Fquih Ben Salah» a annoncé l’Office national de sécurité sanitaire des produits alimentaires (ONSSA) le 10 janvier dans un communiqué.

« Depuis 2014 et afin de protéger le cheptel national, l’ONSSA réalise de façon régulière des campagnes annuelles de vaccination des bovins contre la fièvre aphteuse, ce qui confère au cheptel bovin national un matelas immunitaire satisfaisant », indique le document, notant que « grâce à la stratégie de lutte adoptée en la matière, le Maroc dispose d’un programme de contrôle officiel de la fièvre aphteuse approuvé par l’Organisation mondiale de la santé animale (OIE) ». Par ailleurs, à partir de janvier 2019, une campagne de vaccination de rappel de l’ensemble du cheptel bovin national vis-à-vis de cette maladie a été lancée et vise à renforcer son immunité, selon l’ONSSA.