Le Maroc envoie 700 imams de par le monde pour encadrer le ramadan de sa diaspora

Comme chaque année, une délégation d'imams et de prédicateurs marocains se rendra dans différents pays où résident la diaspora marocaine. Objectif : l'encadrement religieux des ressortissants marocains lors de la période de Ramadan.

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AFP

Cette année, ils seront quelque 700 imams, prédicateurs et prédicatrices à rallier le Vieux-continent pour prêcher un “islam du milieu” cher au Maroc auprès de la communauté des Marocains résidents à l’étranger (MRE) durant le mois de ramadan.

Une pratique vieille de plus de deux décennies, où l’envoi de personnel religieux, en Europe particulièrement, vient “répondre aux besoins spirituels de ce mois sacré”, explique Si Mohamed Rifki, responsable chargé de l’encadrement des 422 imams et “morchidates” (prédicatrice) envoyés par le ministère des Habous.  “Nous demandons aux imams de respecter les lois du pays d’accueil durant la période de Ramadan, détaille Si Mohamed Rifki. Ils doivent se sentir invités, exercer leur mission spirituelle et n’ont aucunement à interférer dans des questions qui ne relèvent pas de leur mission spéciale”. Autrement dit, l’interdiction de se plier à tout commentaire politique ou de prêcher un islam, contraire au rite malékite dominant au Maroc.

Confiance

Le ministère marocain des Habous et des Affaires islamiques a annoncé l’envoi cette année de 422 imams, prédicateurs et prédicatrices pour diriger les prières, donner des conférences et animer les veillées religieuses dans les mosquées pendant le mois du Ramadan. Une délégation qui verra également l’envoi de 253 prédicateurs et prédicatrices supplémentaires, mobilisés par la fondation Hassan II, afin d’encadrer la communauté marocaine basée en Europe.

Une sélection minutieuse initiée par le Haut-conseil des oulémas, présidé par Mohammed VI, et qui demeure la seule instance reconnue en charge de l’ensemble des quatre-vingt-deux conseils régionaux réparties sur l’ensemble du territoire. Alors que dans chaque province siège un conseil local, ce sont ces derniers qui proposent au Secrétariat général du haut-conseil des oulémas les imams prêts à envoyer dans le cadre de cette mission spécifique au mois de ramadan. “Nous parlons là d’institutions officielles qui ont notre entière confiance”, explique notre interlocuteur.

Sont ainsi concernés, les psalmodieurs, dont le ministère requiert comme test, de mémoriser la totalité du Coran et de fournir une réflexion théologique des textes sacrés, mais aussi des prédicateurs et prédicatrices. Le personnel religieux envoyé “devra diriger les prières, animer des conférences et des veillées religieuses dans les mosquées et lieux de culte”, indique le ministère des Habous dans un communiqué. “Il s’agit à presque 95% d’exercer lors des prières nocturnes, très demandées par notre communauté à l’étranger”, ajoute Si Mohamed Rifki. Ainsi, ces psalmodieurs et prédicateurs ont pour mission essentielle de renseigner les fidèles sur la pratique du jeûne et de répondre aux questions qui peuvent en émaner. Des missions auxquelles s’ajoutent ceux “d’unifier les rangs de la communauté marocaine et le renforcement des liens de ses membres”, mais visent également à “assurer l’encadrement religieux des ressortissants marocains en Europe conformément aux constantes nationales”.

Dans des propos relayés par la MAP, le président du rassemblement des Musulmans de Belgique Salah Echellaoui, après avoir accueilli 81 imams et prédicateurs provenant du ministère et de la Fondation Hassan II, voit dans cette délégation un moyen d’ “éclairer les membres de la communauté et corriger certaines interprétations qui peuvent nuire à la compréhension de la religion et à la pratique du culte”. “Le modèle marocain, a-t-il ajouté, offre des réponses concrètes aux besoins religieux et spirituels des fils de la communauté, ce qui requiert un accompagnement de ceux-ci pendant le mois de Ramadan sur divers aspects, sous forme de conseils utiles dans la vie familiale, sociale et la pratique religieuse.”

Rémunérés 30.000 dirhams

Cet encadrement religieux se fait de concert avec les chancelleries, mais aussi les associations religieuses établis dans les pays où vit la diaspora marocaine. En France, par exemple, c’est l’Union des mosquées de France, qui soumet des demandes d’affectations spécifiques aux autorités marocaines. “Le choix répond au besoin réel des entités représentatives des mosquées marocaines établis en Europe, poursuit Si Mohamed Rifki, également Secrétaire général de la fondation Mohammed VI des Oulemas africains. Et d’ajouter : Il est très difficile de répondre à chaque mosquée de façon individuelle. C’est pour cela que le Maroc encourage ces mosquées à se regrouper dans le but d’unifier leurs activités”.

Les imams seront ainsi affectés et répartis dans les différentes mosquées qui en ont fait la demande. Les membres de la délégation sont répartis selon l’importance géographique des membres de la communauté marocaine entre la France (164 membres envoyés), l’Espagne (56), les Pays-Bas (24), la Suède (6), le Danemark (9), l’Allemagne (26), l’Italie (62) et la Belgique (49) pour ce qui concerne ceux envoyés par le ministère des Habous. Des pays dont le mois de jeûne a officiellement débuté ce lundi 6 mai.

À noter que cette envoi concerne d’autres pays, extérieurs à l’Union européenne, puisque le Canada bénéficiera de vingt-cinq membres alors que le Gabon, seul pays africain concerné cette année, accueillera un unique religieux marocain. Le ministère précise aussi que “les pays qui n’ont pas d’organisations officielles représentant le champ religieux marocain n’ont pas été inclus faute de garanties réelles pour l’accueil de la délégation marocaine (Portugal, Suisse, Roumanie…)”.

Le personnel religieux envoyé bénéficie d’une rémunération de 1000 dirhams par jour, soit, 30.000 dirhams le mois, sachant que la prise en charge dépend des entités qui les accueillent. Des conditions auxquelles le ministère se dit attaché, tant d’un côté que de l’autre. “Nous demandons également la garantie que les imams que nous envoyons soient bien reçus du début à la fin de leur séjour”, indique notre interlocuteur en charge de l’envoi des imams dépendant du ministère des Habous. En contrepartie, les psalmodieurs et prédicateurs signent une charte de bonne conduite. Les prédicateurs sont appelés à ne pas aborder des sujets politiques, polémiques, et à agir dans le respect des lois du pays d’accueil, sous peine de recevoir des sanctions. Il en va de la réputation de la formation spirituelle d’imams au Maroc, “cités comme exemple” par les différentes chancelleries concernées, conclut Si Mohamed Rifki.