Accusé d’agression sexuelle aux Pays-Bas, Fouad Laroui dément, la CSMD se refuse à tout commentaire

Les faits remonteraient au mois de janvier 2017. Accusé d’agression sexuelle à l’encontre de plusieurs étudiantes de l’Université d’Amsterdam où il enseigne, l’écrivain marocain Fouad Laroui nie tout caractère sexuel quant aux relations qu’il a pu entretenir avec ses étudiantes. De son côté, la Commission spéciale sur le modèle de développement (CSMD), dont il est membre, se retient de tout commentaire tant que l’enquête est en cours.

Par

L'écrivain et professeur de littérature française Fouad Laroui. Crédit: DR

Le 16 décembre, un article du journal néerlandais NRC n’a pas manqué de susciter des réactions au Maroc. Celui-ci rapporte que l’Université d’Amsterdam aurait chargé, début décembre, le cabinet Berenschot Consultency de mener des recherches sur un professeur marocain de littérature française qui ferait l’objet de plusieurs plaintes émanant d’étudiantes sous couvert d’anonymat. Deux journalistes ont cosigné cet article. Le nom du professeur n’y est pas mentionné, mais quelques indices auront suffi à attirer l’attention d’un lectorat marocain averti : le professeur est marocain, il est écrivain et conférencier, et a reçu plusieurs prix littéraires.

Si cette description correspond à celle de Fouad Laroui, également chroniqueur pour Le360 et membre de la Commission spéciale sur le modèle de développement (CSMD), les deux journalistes, contactées par TelQuel, n’ont pas souhaité révéler l’identité du présumé harceleur. “Nous avons choisi de ne pas révéler son identité et nous souhaitons protéger les étudiantes qui nous ont parlé”, nous ont-elles répondu.

Quelques heures après que TelQuel a contacté ces journalistes, Fouad Laroui a pris la parole dans un article publié par Le Desk, mettant fin au doute quant à l’identité du professeur de littérature française en question. Dans celui-ci, l’écrivain dément toute accusation d’agression sexuelle, mais évoque toutefois un comportement “inacceptable et inapproprié entre une élève et son enseignant”.

“Il y a une enquête en cours (…). Par conséquent, il n’appartient à personne de la commenter ou d’en tirer des conclusions avant que celle-ci ne soit achevée”

CSMD

Contactée par TelQuel au sujet de sa position sur cette affaire, une source au sein de la CSMD nous répond que “la chose la plus importante à garder en tête est qu’il y a une enquête en cours, diligentée par l’Université d’Amsterdam. Par conséquent, il n’appartient à personne de la commenter ou d’en tirer des conclusions avant que celle-ci ne soit achevée”. Celle-ci souligne par ailleurs que la CSMD vient tout juste de finir son rapport, qui devrait être remis au roi Mohammed VI “très bientôt”.

Ce que dit la presse néerlandaise

Selon la presse néerlandaise, une étudiante de 21 ans, en troisième année d’étude, se serait “liée d’amitié” avec son professeur de littérature française en 2016. L’année suivante, le professeur en question “fait un burn-out” et serait tombé gravement malade”. L’étudiante entend dire qu’il ne va pas bien, lui envoie un mail pour prendre de ses nouvelles et lui propose un café. Il lui aurait répondu immédiatement, l’invitant chez lui un vendredi 13 janvier. Toujours selon l’article de NRC, l’étudiante, qui s’attendait à ce qu’il propose de la rencontrer au sein de l’université, s’est dit qu’il était peut-être trop malade pour sortir.

L’étudiante aurait été “touchée et étreinte par lui”.

“Ce qui aurait dû être une tasse de café pour soutenir son professeur, qui était surmené et déprimé, s’est terminé en une expérience d’agression sexuelle”, poursuit l’article de NRC. L’étudiante aurait été “touchée et étreinte par lui”. Toujours selon la même source, “ce n’est qu’au bout d’une heure qu’elle a osé partir avec une excuse”, avec “l’odeur de son après-rasage qui lui piquait toujours le nez”.

Toujours selon l’article, la présumée victime a tenté de réunir les plaintes d’autres étudiantes qui auraient vécu des situations similaires avec le professeur de littérature. En vain : “Elles n’osent pas ou ne veulent pas.” Le 29 août 2017, l’étudiante dépose une plainte officielle. Celle-ci est déclarée recevable trois semaines plus tard, le 19 septembre.

De son côté, Fred Weerman, doyen de la faculté des sciences humaines, a une conversation avec Fouad Laroui, où il lui explique que son comportement est “inapproprié”. Depuis le mois de novembre 2020, il aurait été placé “dans une situation où il n’a aucun contact avec les élèves”. Selon la même source, il serait actuellement suspendu de ses fonctions. Selon NRC, plusieurs élèves de différentes classes se seraient également plaintes du comportement de leur professeur de littérature française.

Les faits, selon Fouad Laroui

Alors qu’il a déclaré au journal néerlandais que l’affaire était classée, refusant donc de répondre aux multiples sollicitations des deux journalistes, Fouad Laroui confie au Desk qu’il est “en sévère burn-out qui le rend incapable de faire quoi que ce soit”. “Comme j’habite seul, des collègues et des étudiant(e)s se relaient pour passer chez moi chaque après-midi, bavarder, boire un thé, me faire une soupe, etc.”, poursuit-il.

“Mon ex-étudiante dit que je lui ai passé la main sur le flanc gauche… Je suis Méditerranéen, pas calviniste”

Fouad Laroui

Vers la mi-janvier 2017, une ancienne étudiante vient passer trois quarts d’heure chez moi, à sa demande. Elle me fait du thé, on bavarde, etc. Au moment où elle s’en va, je lui donne un ‘hug’ (accolade) pour lui montrer ma reconnaissance, parce que je suis touché par son geste”, indique Fouad Laroui à la même source.

Quant au caractère sexuel de ces accusations, Laroui répond : “Mon ex-étudiante dit que je lui ai passé la main sur le flanc gauche… Je suis Méditerranéen, pas calviniste, et je reconnais aujourd’hui que mon comportement n’était pas approprié.” Dans la même lancée, l’écrivain évoque également “un racisme ambiant” à mettre en relation avec sa posture de “Marocain, écrivain engagé, dans un pays où l’extrême droite est très active”.

Quant aux plaintes qui concerneraient d’autres étudiantes, Fouad Laroui les qualifie de “dénonciations abusives” et de pures diffamations”.