La récente crise migratoire aux portes de l’Europe “montre de manière très forte et très spectaculaire la nécessité de faire en sorte que l’Europe soit au rendez-vous de sa politique migratoire. Elle ne l’est pas”, a souligné le ministre français des Affaires étrangères et de l’Europe, l’invité, dimanche, de l’émission hebdomadaire “Le Grand Jury” de LCI-RTL, consacrée à la politique française.
Selon M. Le Drian, les récents “incidents” à Sebta sont “tout à fait regrettables”. “Il y a une relation en ce moment assez compliquée entre l’Espagne et le Maroc et je souhaite que cela puisse se rétablir le mieux possible. Parce que jusqu’à présent, il y avait sur la question de l’immigration une relation plutôt positive, partagée entre le Maroc et l’Espagne”, a-t-il dit.
“Quelques éléments, quelques incidents ont amené cette tension particulière”, a souligné le chef de la diplomatie française, affirmant s’être entretenu samedi avec son “collègue marocain” Nasser Bourita, “pour essayer de contribuer à ce que ce dialogue puisse reprendre”.
Lors de cette émission qui a consacré une bonne part à la question migratoire, le ministre Le Drian a souligné l’importance pour l’Europe de se doter d’une “vraie politique migratoire”.
Le Pacte asile et migration sur la table
“Il y a actuellement sur la table un texte qui s’appelle le Pacte asile et migration qu’il nous faut traiter globalement, et ce sera sans doute de la responsabilité de la présidence française (du Conseil européen lors des six premiers mois de 2022, ndlr), d’achever les discussions qui sont en cours”, a-t-il indiqué.
Selon le chef de la diplomatie française, cette politique migratoire, qui doit “respecter les grands principes de responsabilité et de solidarité”, “suppose un filtrage et l’identification de ceux qui doivent retourner dans leur pays d’origine et ceux qui sont éventuellement ressortissant du droit d’asile qu’il nous faut respecter par ce qu’il est constitutionnellement pour nous indispensable à maintenir et qu’il fait partie aussi de la vocation de l’Union européenne”.
“Ce n’est pas parce que la géographie pénalise d’une certaine manière les pays dits de première rentrée que les autres ne doivent pas participer à l’effort”
Cette politique migratoire de l’Europe, “veut dire aussi qu’il y a une solidarité entre les différents pays européens pour ‘se partager’ ceux qui sont véritablement des demandeurs d’asile et pour aider les pays de première rentrée à assurer la logique de filtrage”, a-t-il ajouté. “Ce n’est pas parce que la géographie pénalise d’une certaine manière les pays dits de première rentrée que les autres ne doivent pas participer à l’effort.”
Une aide pour le développement des pays émetteurs
Enfin, cette politique suppose que “nous sommes en situation de pouvoir agir auprès des pays de transit ou des pays d’origine pour qu’à la fois on rapatrie leurs ressortissants dans les pays de transit ou d’origine et puis qu’on aide ces pays à se développer”.
“Ce qui veut dire une loi de développement suffisamment significative des grands enjeux sur la politique africaine évoqués il y a quelques jours (par le président Emmanuel Macron), lors de la rencontre sur le forum des économies africaines de demain”, estime le ministre français.
“Il faudrait parallèlement un effort de développement considérable des pays d’origine”
Sur ce Pacte asile et migration, “il faudrait parallèlement un effort de développement considérable des pays qui sont des pays d’origine, parce que sinon on ne s’en sortira pas”, a martelé Jean-Yves Le Drian, soulignant la nécessité d’aider les pays émetteurs de l’immigration à assurer leur propre développement et “cela passe par la scolarisation, inévitablement”.
Sur la question du retour des migrants qui ne sont pas éligibles au droit d’asile, le ministre français des Affaires étrangères a répondu que lorsque le Pacte asile et migration sera mis en place, “il y aura des lieux de filtrage de ceux qui viennent en situation irrégulière et qui devront être rapatriés chez eux”. “C’est ça l’accord européen vers lequel il faut tendre. Pour le moment, nous n’y sommes pas.”
Distinguo entre migrants réguliers et irréguliers
Prié de dire si l’Europe, la France notamment, doit rester une terre d’accueil pour les mineurs migrants, Jean-Yves Le Drian a répété que “la France se doit, comme l’Europe, d’accueillir ceux des migrants qui sont demandeurs d’asile parce que le critère qui est retenu pour la demande d’asile aura été reconnu”.
“On doit avoir un traitement différent sur les migrants réguliers et les migrants irréguliers”
Lors de cette émission, il a aussi été question du débat politique actuellement en France sur l’immigration, à un an des prochaines présidentielles : entre ceux qui proposent un moratoire sur l’immigration de trois à cinq ans et ceux qui estiment que la France a besoin de l’immigration pour assurer sa croissance démographique, Jean-Yves Le Drian a affirmé que “l’on confond allègrement les migrations acceptées, dites partenariales, qui font que des entreprises recrutent des migrants sur contrat de travail avec des compétences données, et l’immigration irrégulière”. Et, “tant que l’on ne clarifiera pas cette situation, on aura un débat qui sera tronqué”.
“On doit avoir un traitement différent sur les migrants réguliers et les migrants irréguliers”, a-t-il considéré.
(avec MAP)