Cinq calligraphes marocains qui donnent à cet art ses lettres de noblesse

La calligraphie, art ancestral, retrouve ses lettres de noblesse grâce à une nouvelle génération soucieuse de conserver ce patrimoine culturel. Plusieurs Marocains se distinguent au sein de cette nouvelle génération. Nous vous amenons à la découverte de cinq d'entre eux.

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Organisé du 10 au 15 août au Caire par le Fonds égyptien pour le développement culturel en coopération avec le secteur de l’art plastique égyptien, la maison de l’Opéra et le syndicat des calligraphes égyptiens, la 3e édition du Forum de la calligraphie arabe a rendu hommage au Marocain Hamid Kharbouchi.

Lundi 14 août, au musée de Casa Antiguo Club Americano à Guatemala city, a été inaugurée l’exposition d’une quarantaine d’œuvres d’un autre calligraphe marocain, Abdelhamid Az-Zubair. Organisée par l’ambassade marocaine dans le cadre de la 20e édition du prestigieux Festival du Centre Historique de la ville de Guatemala, cette manifestation a été lancée afin de faire découvrir au public de l’Amérique centrale la richesse de cet art authentique.

Calligraphie de Hamid Kharbouchi
Calligraphie de Hamid Kharbouchi / Crédit DR

Cet art ancestral connaît une renaissance grâce aux travaux d’une nouvelle génération d’artistes soucieux de préserver ce patrimoine culturel. D’abord réservée à l’art du livre, on retrouve aujourd’hui la calligraphie dans plusieurs représentations artistiques et notamment en peinture.

Hormis Hamid Kharbouchi dont le style se distingue par un trait épais et Abdelhamid Az-Zubair dont les oeuvres se caractérisent par des traits vifs, nous avons sélectionné cinq calligraphes marocains dont la recherche d’esthétisme est commune, malgré des formes d’expression bien différentes.

Noureddine Daifallah, le plus peintre

Noureddine Daifallah mélange technique et émotion. Il explore les possibilités de la calligraphie entre maîtrise du trait et exploration des sens. À ses débuts, il couche de fines lettres noires rehaussées de couleurs vives. Puis, il approfondit ses réflexions à travers des formes de plus en plus géométriques. D’abord artisan, Daifallah explore à travers sa calligraphie de nouveaux horizons, laissant libre cours à la peinture, tantôt moderne, tantôt contemporaine, toujours affranchie et délicate.

Noureddine Daifallah, 2007 Crédit La Marocaine Des Arts
Noureddine Daifallah, 2007
Crédit La Marocaine Des Arts

Saïda El Kiyale, la touche féminine

Sa calligraphie est discrète et éclatante à la fois. Elle exploite la lettre arabe sans pareil et poursuit une réflexion continuelle. Saïda El Kiyale crée un monde où la couleur règne. Ses œuvres sont brutes, sans artifice. Elle maîtrise la plume à la perfection, laissant l’encre reproduire impeccablement des calligraphies géométriquement remarquables. Son pinceau retranscrit ses émotions, originelles et insoumises, parfois presque primitives.

Saida El Kiyale, 2013 Crédit DR
Saida El Kiyale, 2013 / Crédit DR

Sadik Haddari, le plus enchanteur

Bien qu’il soit originaire de Rabat, on le surnomme le calligraphe d’Assilah. Sadik Haddari aime la couleur et à travers cette couleur, il cherche la lumière. Ses lettres calligraphiées sont prises dans un mouvement constant. Le mouvement est sûr, authentique. Comme prises dans des vagues, souvent bleues, au trait plus épais, ses lettres se fondent dans ce tourbillon, impassibles. Au-delà de la calligraphie sur papier, Sadik Haddari réalise des sculptures en bois magnifiant les courbes et autres délicatesses de la calligraphie arabe.

Sadik Haddari / Crédit Sadik Haddari
Sadik Haddari / Crédit Sadik Haddari

Mohamed Amzil, le plus classique

Très jeune, Mohamed Amzil se fascine pour la calligraphie. C’est la richesse esthétique intemporelle de cet art ancestral et authentique qui le pousse, dès son plus jeune âge à s’essayer à cette forme d’expression plastique. Formé aux Beaux-Arts de Casablanca, il n’y suivait néanmoins pas de cours de calligraphie. C’est en reprenant les traits de grands maîtres calligraphes que son mouvement se développe. Il contemple d’abord et exécute après, décortiquant la calligraphie pour en extraire un ensemble critique.

Mohamed Amzil / Crédit Mohamed Amzil
Mohamed Amzil / Crédit Mohamed Amzil

Mohammed Qarmad, le plus mystique

C’est à l’école coranique que Mohammed Qarmad, âgé de 6 ans, découvre la calligraphie. Passionné par ce moyen d’expression, il crée des symphonies à partir de mouvements précis. Il assoit l’encre sur une feuille traditionnellement, à l’aide d’un kalam de bambou. Distingué par le grand prix d’honneur du roi Mohammed VI de la calligraphie arabe, on retrouve ses travaux sur des billets de Banque du Maroc. Il a également réalisé différents corans, dont une calligraphie sur cuivre pour l’armée de l’air marocaine.

Mohamed Qarmad / Crédit DR
Mohamed Qarmad / Crédit DR

 

Le petit plus

Leyto est sans nul doute le calligraphe le plus street. Issu de la scène graffiti bretonne, cet artiste français maîtrise les arts de la rue. Passionné de calligraphie, il exploite ses talents pour donner un nouveau souffle à cet art de l’écriture. Le noir est très présent dans ses travaux parsemés de couleurs vives, notamment le jaune, le bleu et surtout le rouge. Sa calligraphie est épaisse et crue. Les références street art sont omniprésentes dans ses courbes et autres arabesques.

Leyto 2015 / Crédit Leyto
Leyto 2015 / Crédit Leyto

 

Calligraphie, les origines

L’origine de la calligraphie arabe remonterait, pour certains chercheurs, aux Nabatéens, mais son développement est indissociable de l’histoire de la civilisation islamique. La première sourate du texte coranique proclame d’ailleurs que ce fut « Dieu qui enseigna à l’homme l’art de l’écriture ».

Avec ses variantes graphiques codifiées au Xe siècle par Ibn Mû-qla, un des plus grands calligraphes islamiques de l’époque abbasside, l’écriture reste un des éléments fondateurs et incontournables de la civilisation islamique. Véritable iconographie de l’Islam et expression suprême de l’art, elle enregistre et transmet le message divin.

Du grec kállos (beau) et grapheîn (écrire), la calligraphie, ou l’art de l’écriture représente étymologiquement la belle écriture. Dans la calligraphie arabe, les styles calligraphiques se divisent en deux grandes catégories : le kufique, aux caractères angulaires, né très tôt avec l’écriture hijazi des premiers corans et le cursif, aux caractères déliés. Au Maroc, on retrouve un des styles du cursif, le nashkî, très utilisé dans le monde arabe, et notamment une de ses variantes, le maghribî.[/encadre]

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