Abdelatif Ouahbi veut dissoudre des instances du parti

La proposition, soumise lors d'une réunion avec un «comité des sages» du parti, a provoqué une énième crise interne au sein de la formation au tracteur. 

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Le secrétaire général du PAM, Abdellatif Ouahbi.

Le torchon continue de brûler entre le secrétaire général du PAM  Hakim Benchamach et certains cadors du parti. Un mois seulement après le réquisitoire de Fatima Zahra Mansouri contre la gestion de l’actuel secrétaire général, voici qu’un autre ténor du parti, en la personne d’Abdellatif Ouahbi, appelle à la tenue d’un congrès extraordinaire pour le début de l’année 2019.

Une rencontre qui pourrait déboucher sur la dissolution des bureaux politique et fédéral du parti au tracteur. Cette proposition, qui a fait l’effet d’une bombe,   a été formulée lors de la réunion d’un «comité de sages» fraîchement créé pour désamorcer la crise qui couve depuis plusieurs mois.

«On ne peut pas faire comme si de rien n’était. Certains membres du bureau politique sont parachutés et n’ont pas de légitimité. Idem pour le bureau fédéral. Avant son élection, nous avons discuté avec Hakim Benchamach sur un certain nombre de points à réformer, mais il n’a tenu aucun engagement», nous explique Abdellatif Ouahbi, membre du bureau politique et représentant de la région Souss Massa. Il ajoute : « j’ai profité de la réunion du comité des sages pour exprimer un avis qui n’engage que moi ».

« Le comité écoute tout le monde même les voix dissonantes »

Coordonné par Ahmed Akhchichine, le comité des sages du PAM est constitué de l’ancien secrétaire général du parti Mustapha Bakkoury, du député Mohamed El Hammouti, du président du Conseil de la région de l’Oriental Abdenbi Bioui, et de l’ancien député Mehdi Bensaid. Ce dernier nous explique sa genèse : «après l’élection de Hakim Benchamach, nous avons traversé une crise prolongée au sein du parti. Beaucoup de questions pressantes, liées entre autres à l’organisation interne et au projet politique que nous défendons, restaient en suspens et ce n’était plus tenable».

Le comité, vieux de trois semaines, planche sur un diagnostic de la situation du parti du tracteur. « On en a d’abord discuté avec le secrétaire général du parti qui était en principe d’accord avec cette initiative et on a ensuite entamé une tournée régionale », ajoute notre interlocuteur. Après une première réunion avec les cadres de la région de Rabat, une autre rencontre s’est tenue la semaine dernière avec les militants PAM du Souss. Ouahbi a soumis sa proposition lors de cette réunion.

La réponse véhémente de Benchamach

Le sujet a été discuté le 25 décembre lors d’une réunion du bureau politique du PAM, qui n’était pas au complet. La proposition ne semble pas avoir trouvé écho auprès du secrétaire général du parti et de ses soutiens. «Au cours de cette réunion, le bureau politique a observé le comportement contradictoire avec les positions des instances du parti (…) exprimé par des voix très limitées, qui ont appelé à la dissolution des bureaux politique et fédéral et à la mise en place d’un congrès extraordinaire», peut-on lire dans un communiqué diffusé le 26 décembre.

La communication qualifie également le comportement d’Abdellatif Ouahbi d’ «odieux», et indique que ses propositions ont été rejetées «par la base du parti (…), car elle met en cause la légitimité démocratique de ses instances». «Le parti n’est pas concerné par les décisions prises en dehors des canaux organisationnels», tranche le communiqué.

La véhémence du communiqué ne laisse pas de marbre Abdelatif Ouahbi :  je n’ai fait qu’exprimer un avis qui n’engage que moi et je ne comprends pas la violence du langage utilisé dans ce communiqué qui en dit long sur le niveau politique des personnes qui l’ont écrit. Parler de putsch est tout de même excessif».

Même son de cloche du côté de Mehdi Bensaid. «C’est d’abord un problème interne qui aurait pu être réglé de manière apaisée en convoquant par exemple le comité des sages. C’est malheureux de constater que des personnes tentent de mettre de l’huile sur le feu. Après tout le PAM n’appartient ni à Hakim Benchamach, ni à des membres du bureau politique qui cherchent avant tout à défendre leurs intérêts», nous dit-il.

Après le clash, l’éternelle question de l’implosion

La présidente du Conseil national du PAM, Fatima Zahra Mansouri, a pour sa part été appelée à préparer la nouvelle session de l’organe qu’elle dirige dans «un délai d’un mois tout au plus». Le bureau politique indique aussi qu’une réunion est prévue le 5 janvier 2019 avec le bureau fédéral. Une autre rencontre se tiendra avec les deux groupes parlementaires le 13 janvier 2019.

« Faire semblant que tout va au mieux est une erreur… nous vivons une crise qu’il faudrait régler. Nous devons d’abord rétablir la confiance dans nos rangs, placer les bonnes personnes dans les postes à responsabilité et penser en profondeur notre projet politique. Le comité a tenté d’éviter le clash, mais certaines personnes poussent vers le déchirement», affirme Mehdi Bensaid.

Les remous internes de ces derniers mois semblent indiquer que la deuxième force politique au parlement est au bord de l’implosion. Ce scénario se lisait déjà dans la missive assassine adressée par l’ancienne présidente du conseil communal de Marrakech à Hakim Benchamach, mais également dans les blâmes qui auraient été infligés à certains responsables régionaux du parti, dont Ahmed Akhchichine,  selon Le1. Abdelatif Ouahbi reste toutefois confiant : « je suis convaincu que nous allons réussir à dépasser cette crise et je n’imagine pas pour le moment un scénario catastrophe pour le parti ».