Qui est Ahmed Mansour, le journaliste visé par un mandat d'arrêt émis par le Maroc?

Le journaliste et présentateur égyptien d’Al Jazeera fait l’objet d’un mandat d’arrêt au Maroc. Son mariage coutumier avec une militante du PJD en serait la cause. Retour sur le passé d'un personnage plus que controversé.

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AFP

Depuis quelques jours, le journaliste égyptien, détenant également la nationalité britannique, Ahmed Mansour est sous le coup d’un mandat d’arrêt marocain, émis par le procureur du roi près du tribunal de première instance de Rabat. « Le mandat d’arrêt a été émis le 18 janvier et comprend une accusation de tromperie par le biais d’un mariage coutumier « , a fait savoir une source bien informée à TelQuel Arabi.

Selon cette dernière, « Ahmed Mansour fait face à une plainte déposée par Mme Karima Frites, qu’il avait épousée avec un mariage coutumier sans faire un contrat de mariage« . Convoqué par la justice marocaine, le journaliste égyptien n’a pas assisté aux audiences de son procès, raison pour laquelle un mandat d’arrêt national a été diligenté à son encontre, souligne la même source.

L’union avec Karima Frites

L’affaire en question remonte à 2012. Ahmed Mansour qui présentait alors l’émission « Bila Houdoud (Sans frontières) » sur la chaine de télévision qatarie Al Jazeera, était de passage au Maroc où il a participé à un congrès du Pari de la justice et du développement (PJD). C’est là où il rencontre Karima Frites, affiliée au parti islamiste et cadre à la Direction générale des impôts, avant de lui demander sa main, précise le journal en ligne Hespress. « Il m’a parlé avec beaucoup de respect devant tout le monde et m’a dit que je lui plaisais et qu’il voulait m’épouser conformément à la religion islamique », a-t-elle affirmé sans un entretien avec le journal arabophone.

« Je lui ai dit : tant que tu veux du sérieux, tu peux venir chez moi. Je lui ai donné le numéro de téléphone de mon père pour qu’il lui parle. Il est venu chez ma famille à Salé (…) et a demandé ma main. Ma famille a accepté et on a célébré nos fiançailles dans la tradition marocaine », ajoute-t-elle.

Selon elle, le journaliste a exigé ensuite que le mariage soit célébré en secret. Le couple aurait ainsi passé sa lune de miel entre Paris et Istanbul. Karima Frites découvre après qu’elle a été victime d’une supercherie puisque ce n’était pas la première fois où Ahmed Mansour contracte un mariage coutumier, rapporte la même source. Le 360, affirme de son côté, qu’il aurait déjà contracté pas moins de 17 mariages coutumiers.

Le site d’information avait également affirmé que Abdelali Hamieddine, membre du secrétariat général du PJD, était présent à la célébration religieuse de leur union. Ce dernier avait alors assuré dans un post publié sur Facebook qu’il n’avait jamais fait office d’intermédiaire entre le couple, sans toutefois démentir sa présence au mariage.

Insultes envers la presse marocaine

Plusieurs journaux marocains avaient alors relaté l’affaire. Chose que Ahmed Mansour n’a pas appréciée, allant jusqu’à qualifier les journalistes marocains de « proxénètes » et d’« ordures ». Des « insectes et parasites qui vivent dans les poubelles et ne méritent que d’être écrasés », avait-il écrit en 2015 sur son compte Facebook. La Fédération marocaine des éditeurs de journaux (FMEJ) et le Syndicat national de la presse marocaine (SNPM) étaient alors montés au créneau pour condamner les propos de l’animateur égyptien.

« Pour réagir à une information publiée par la presse marocaine, qu’elle soit vraie ou fausse, la déontologie et les lois garantissent le droit de réponse, la mise au point ou le recours à la justice au lieu de verser dans un langage de bas étage », avait réagi la FMEJ dans un communiqué, tout en dénonçant ce « comportement inédit d’humiliation ». Salaheddine Mezouar, ministre des Affaires étrangères à l’époque, avait également réagi à ses insultes. « Porter atteinte de cette façon dangereuse contre des citoyens marocains qui assument d’importants rôles » équivaut à « une atteinte contre le Maroc », avait-il estimé, appelant au passage à une mobilisation contre « cette décadence morale ».

Peu avant cette sortie, Ahmed Mansour avait été arrêté, en juin 2015 à Berlin, sur la base d’un mandat d’arrêt international émis par l’Egypte, qui l’accuse de plusieurs crimes. Il avait alors été relâché deux jours plus tard. C’est Al Jazeera qui avait annoncé sa remise en liberté et l’abandon de toutes les accusations retenues contre lui. En 2014, l’Egypte l’avait, en effet, condamné par contumace pour avoir « torturé un avocat en 2011 sur la place Tahrir« .

Des manifestants réclamant la libération du journaliste Ahmed Mansour, devant la cour criminelle de Berlin, le 22 juin 2015.Crédit: AFP

Selon l’AFP, sept autres accusés, tous des cadres des Frères musulmans, avaient également été condamnés à trois ans de prison dans le cadre de cette affaire. Ils auraient pris cet avocat pour un agent du service de sécurité de l’Etat, le « redoutable organe du ministère de l’Intérieur qui était chargé de surveiller les opposants« . Ahmed Mansour « a rejeté ces accusations absurdes« , avait assuré Al Jazeera à l’époque.