Le Conseil paix et sécurité officiellement dessaisi du dossier du Sahara

Selon un avis émis par le Conseiller juridique de l’Union africaine, le Conseil paix et sécurité de l’organisation panafricaine ne pourra plus  « soulever, citer ou se référer à la situation au Sahara occidental de quelque manière que ce soit ». Un avis qui confirme que le CPS devra se tenir à une décision prise par les chefs d’État et de gouvernement au mois de juillet dernier.

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Le commissaire à la paix et sécurité de l'UA, l'Algérien Smail Chergui. Crédit: AFP

Le Conseil paix et sécurité de l’Union africaine (CPS) ne pourra plus évoquer le dossier du Sahara. C’est ce qu’indique un courrier datant du 8 février, et que nous avons pu consulter. La lettre a été rédigée par le représentant permanent du Nigéria auprès de l’Union africaine (UA), Bankole Adeoye, et adressée aux représentants permanents des autres pays membres de l’Union africaine.

Pour rappel, lors du dernier sommet de l’UA, qui s’est tenu au mois de juillet à Nouakchott, les chefs d’États et de gouvernement africains avaient convenu d’accorder un mandat d’information à un mécanisme composé de la troïka de l’organisation panafricaine (le président en exercice de l’Union, son prédécesseur et son successeur) et du président de la commission de l’UA. Un mandat qui signifiait que seul ce mécanisme était habilité à discuter du dossier du Sahara.

Cette décision avait été interprétée de manière singulière par le Commissaire à la paix et la sécurité, l’Algérien Smail Chergui, qui avait estimé que le CPS pouvait discuter du dossier sans pour autant prendre de décisions. Désormais, un avis émis par le Conseiller juridique de l’UA donne une portée juridique à cette décision comme l’indique la missive rédigée par le diplomate nigérian.

En effet, le Conseiller juridique de l’UA a indiqué que la décision prise par les chefs d’État et de gouvernement « concerne le CPS que ce soit au niveau des ministres ou des ambassadeurs ». Il précise que le CPS ne pourra plus « soulever, citer, ou se référer à la situation au Sahara occidental de quelque manière que ce soit ». Le CPS devra donc se tenir à l’esprit de la décision prise lors du 31e sommet de l’UA.

La missive de Bankole Adeoye indique également que toute référence au Sahara sera supprimée du prochain rapport rédigé par le Commission paix et sécurité. Ainsi, lors du 32e sommet de l’Union africaine qui se tient actuellement à Addis-Abeba, aucune décision ni aucun document faisant référence à la situation au Sahara ne sera adopté. Une première dans l’histoire de l’UA.

Cette décision est significative puisqu’elle vient renforcer le processus onusien et réduit l’impact que peut avoir le CPS sur le dossier du Sahara. Historiquement, le CPS a développé une littérature nuisible au Maroc sur ce dossier, en témoigne le rapport rédigé en février 2018 par Smail Chergui au nom des chefs d’Etat et de gouvernement de l’UA. Le document appelait le Royaume et le Polisario  à mener « des discussions directes et sérieuses sous l’égide de l’Union africaine et de l’ONU » et exhortait le Maroc à « autoriser le retour de la mission de l’observation (de l’UA, NDLR)  à Laâyoune [et] un monitoring des droits de l’homme sur le territoire (au Sahara, NDLR) ».

Dans le même texte, le CPS intimait au Maroc l’ordre de ne plus organiser le Forum Crans Montana à Dakhla, tout en appelant la « société civile africaine et les autres acteurs concernés à boycotter la prochaine rencontre prévue du 15 au 20 mars 2018 ». Suite à son élection au CPS, en janvier 2018, la diplomatie marocaine s’était fixé comme objectif de « nettoyer » le traditionnel rapport du président du Conseil paix et sécurité. Il semble désormais que cet objectif est accompli puisqu’un dispositif juridique a été mis en place pour éviter tout détournement concernant le dossier du Sahara à l’UA.