Maroc-Arabie saoudite: Mohammed VI reçoit Turki Alshikh

Une photo diffusée ce mardi et devenue virale sur les réseaux sociaux montre le très controversé conseiller royal saoudien Turki Al Alshikh reçu en audience par Mohammed VI. Un rapprochement inattendu, au vu des nombreuses piques adressées au Maroc par cet homme fort du régime saoudien au cours des derniers mois.

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Un cliché et des questions. Mardi 16 avril au soir, une photo montrant Mohammed VI posant avec Turki Al Alshikh a fait irruption sur la toile. Bras dessus, bras dessous, sourires aux lèvres, la pose ne laisse aucun doute sur les intentions de réchauffement. Accolée à la photographie partagée par le conseiller royal saoudien, la description vient entériner le constat.  “Je suis honoré en ma qualité de président de l’Union arabe de football que la prochaine édition du championnat arabe portera un nom très cher à tous les Arabes, celui de Sa Majesté le roi Mohammed VI, que Dieu le préserve, qui nous a honoré de l’approbation : la finale 2020 aura lieu  à Rabat”.

L’image a de quoi surprendre, au vu des récents développements, et des sorties médiatiques du sulfureux dignitaire saoudien.

أتشرف كرئيس الاتحاد العربي لكرة القدم بأن تكون النسخه الثانيه من البطوله العربيه تحمل مسمى غالي على كل العرب جلالة الملك محمد السادس حفظه الله الذي تكرم علينا بالموافقه … ٢٠٢٠ النهائي في الرباط الغالية 🇲🇦❤

Publiée par ‎تركي آل الشيخ – Turki Al Alshikh‎ sur Mardi 16 avril 2019

Feuilleton

Nouvel épisode d’un feuilleton mouvant, la rencontre entre Mohammed VI et Al Alshikh s’ajoute à une séquence placée sous le signe du réchauffement entre le Maroc et l’Arabie saoudite. Les 9 et 10 avril, le ministre marocain des Affaires étrangères, Nasser Bourita, s’était entretenu avec le prince héritier saoudien Mohammed Ben Salmane, avant de rencontrer le roi Salmane dans le cadre d’une tournée dans le Golfe.

Le 21 mars l’agence de presse officielle saoudienne SPA rapportait que le roi Salmane avait appelé Mohammed VI à examiner “les relations fraternelles et amicales”, entre leurs deux pays. Un premier geste adressé au Maroc après une période marquée par une passe d’armes par médias interposés entre les deux pays.

Ainsi, lors d’une interview accordée en janvier par Nasser Bourita à la chaîne qatarie Al-Jazeera, en conflit ouvert avec le royaume wahhabite, le ministre marocain avait rappelé la position de “neutralité constructive” adoptée par le Maroc au déclenchement de la crise qui oppose le Qatar à ses voisins depuis juin 2017. Peu de temps après cet entretien, la chaîne d’État saoudienne Al Arabiya diffusait un sujet sur la question du Sahara, retraçant un historique controversé de la région, indiquant que le “Maroc l’avait envahi après le départ des colonisateurs espagnols en 1975”. Suffisant pour attiser la colère de Rabat.

Mohammed VI remplace Cheikh Zayed

Turki Al Alshikh a lui aussi contribué à la liste des griefs entre Rabat et Riyad. Pour l’organisation de la Coupe du monde 2026, il a ouvertement soutenu la candidature des États-Unis, et torpillé celle du Maroc. Dans son sillage, sept pays arabes ont voté contre Rabat. Une position qu’il a justifiée sur Twitter par les liens privilégiés entre le Maroc et le Qatar. Le lendemain du vote à Moscou, sous la huée de supporters marocains venus suivre les Lions de l’Atlas, alors engagés dans le Mondial 2018 de Russie, lui s’affichait narquois, sourire aux lèvres.

La liste des affronts ne s’arrête pas là. Le 16 janvier dernier, lors de l’annonce du tirage au sort de la finale de la Coupe arabe des clubs champions, le site de l’Union arabe de football (UAFA) qu’il préside publie une carte du Maroc… tronqué de son Sahara. Pour beaucoup d’observateurs, la bourde est bien trop grosse pour ne pas y voir la main du conseiller du roi Salmane.

Depuis l’été 2017 et la désignation de Mohammed Ben Salmane comme prince héritier, Turki Al Alshikh a été chargé d’une mission de première importance : incarner les nouvelles ambitions saoudiennes sur la scène sportive mondiale. Disposant du rang de ministre et d’un budget quasi illimité, il préside l’Autorité générale du sport (AGS), mais aussi le Comité olympique saoudien, l’Union des associations arabes de football et la Fédération sportive de la solidarité islamique… Rien d’étonnant pour un homme omniprésent.

Turki Al Alshikh n’en est pas à un retournement de veste près. Dernière preuve en date : le fait de concéder à Mohammed VI, le nom d’une compétition qu’il a lui-même nommée cette année d’après Cheikh Zayed, père fondateur des Émirats arabes unis… pays avec qui le Maroc entretient des  relations tout aussi troubles.