La Chine paralysée, l’Europe immobilisée, les Etats-Unis aux abois après un retard à l’allumage dû à l’étrange laxisme de Donald Trump … la propagation du coronavirus, pour l’instant, ne donne aucun signe de recul. Outre, la vigilance sanitaire qui s’impose, volet où le Maroc a pris des dispositions radicales dans le but de prévenir une transmission communautaire du virus, un grand point d’interrogation se pose quant au traitement économique des effets du covid-19. Jusqu’à présent, hormis un comité de veille économique, piloté par le ministère des Finances et des mesures anti-sécheresse annoncées par le ministre de l’Agriculture Aziz Akhannouch, aucun plan de soutien aux secteurs productifs n’est visiblement dans le pipe.
En première ligne face aux répercussions potentielles de la propagation du virus sur l’Economie, des ministres exclusivement RNistes. Dans le textile, filière particulièrement éreintée par la pénurie d’intrants, Moulay Hafid Elalamy, ministre de l’Industrie devra trouver la parade pour soulager un secteur déjà sévèrement affaibli par des ALE mal ficelés. Songe-t-il à l’instar d’autres pays en lutte contre le Corona à faire un geste sur les charges patronales ou l’IS ? Quid de l’automobile, métier mondial dépendant des importations de composants chinois ? Faudra-t-il adopter des mesures compensatoires à la décélération de la production et donc du volume exportable ?
S’agissant du tourisme, la facture serait particulièrement salée selon une série de prévisions. Une étude de CFG prophétise même une baisse de 5 millions du nombre de touristes en 2020. Comment aider les professionnels à limiter les pertes ? C’est sur cette problématique épineuse que devra plancher la fraîchement nommée ministre du Tourisme Nadia Fettah, ex-Saham et néo-Rniste dont les premiers pas à la tête de son maroquin ont surtout été prétexte à réflexion stratégique. Autre casse-tête : le cas RAM. Sérieusement impactée par l’annulation de liaisons essentielles vers l’Europe, la compagnie nationale a annoncé des mesures d’austérité draconiennes (congés sans solde, temps partiel) pour parer à une décrue prévisionnel de son volume d’affaires de 30%. Déjà privée de contrat-programme par la tutelle, RAM devra-t-elle se dépêtrer seule d’une situation de crise extrême ? A ce stade, seule Nadia Fettah possède la réponse.
Côté agriculture, 2020 peut d’ores et déjà être qualifiée d’annus horribilis. Avec une prévision de 40 millions de quintaux versus une hypothèse Loi de finances de 70 millions, la campagne arbore des airs de désastre. Outre la sécheresse, la mauvaise saison est aggravée par l’annulation du SIAM, plaque tournante du commerce agricole et canal d’écoulement de la production et d’une partie du cheptel. Un soutien de 55 millions de dirhams pour l’achat d’orge est certes acté, mais cela suffit-il à compenser le manque à gagner des petits acteurs du secteur, survivant principalement de cultures vivrières sous sérieux stress hydrique. Aziz Akhannouch puisera-t-il suffisamment dans le Fonds de développement agricole pour limiter la casse dans un secteur qui emploie 15 % de la population active ?
Enfin, l’argentier du royaume Mohamed Benchaâboun lancera-t-il une politique budgétaire expansionniste pour aider l’ensemble des secteurs touchés à demeurer à flot le temps que la crise se dissipe ? Très jaloux des équilibres macroéconomiques et soucieux de satisfaire les prescriptions du FMI, pourra-t-t-il creuser le déficit et aggraver l’endettement public pour fournir du rab à un tissu économique en voie de sinistralité ? La responsabilité qu’endossent les ministres RNI dans ce contexte très particulier est immense. Observés à la loupe par l’opinion publique, ils n’ont pas droit à l’erreur. Sauront-ils se montrer à la hauteur de l’instant?