La nouvelle souche du virus amènera-t-elle à une fermeture des établissements scolaires ? Si la variante anglaise du SARS-CoV-2 n’a pas encore fait l’objet de détection dans les frontières du pays, le curseur d’alerte reste au maximum au vu de la contagiosité de la mutation. Notamment chez les mineurs où la nouvelle souche apparue au Royaume-Uni semble se propager particulièrement vite chez cette couche de population.
C’est ainsi qu’une circulaire du ministère de la Santé, diffusée le 7 janvier, appelle certaines directions régionales à la vigilance, ainsi qu’au lancement d’une opération de dépistage au Covid-19. Six régions sont concernées : Casablanca-Settat, Rabat-Salé-Kénitra, Marrakech-Safi, Tanger-Tétouan-Al Hoceima, Fès-Meknès et le Souss-Massa. L’objectif : “Estimer la circulation du virus chez la population de moins de 18 ans et caractériser génétiquement les variants circulants.”
30.000 élèves concernés
Menée en “étroite collaboration” avec le ministère de l’Éducation, cette opération de dépistage a démarré “le 8 janvier à Marrakech”, nous explique une source autorisée du département en question. Et de poursuivre : “Le démarrage dans d’autres régions est attendu pour le mardi 12 janvier”.
D’après le document, près de 30.000 élèves sont concernés, dont 10.000 rien que pour la région Casablanca-Settat qui figure toujours en tête des contaminations dans le pays. 4000 élèves par région vont également se prêter au dépistage. Une campagne qui, d’après nos informations, est également pilotée par les Académies régionales de l’éducation et de formation (AREF), en plus des directions régionales de la Santé.
Les dépistages se multiplient dans les écoles où la propagation du variant y est redoutée. Jusque-là plus ou moins épargnés par la propagation lancinante du Covid-19, les moins de 18 ans y seraient particulièrement exposés, d’après les scientifiques. Apparue à Londres et au sud-est de la Grande-Bretagne, la mutation de ce nouveau variant a été isolée chez de nombreux jeunes britanniques.
Prudence
Fin décembre, le Nevtag (le groupe de conseil britannique des virus respiratoires émergents), s’appuyant sur une analyse préliminaire de l’Imperial College de Londres, indiquait que “chez les enfants de moins de 15 ans il peut y avoir une augmentation de la transmission de la variante”.
Le professeur Ahmed Aziz Bousfiha, expert en immunologie et chef de service des maladies infectieuses à l’Hôpital d’Enfants Abderrahim Harouchi, à Casablanca, se veut encore prudent tant le recul n’a pas permis d’avancer des conclusions. “Pour le moment, ce que l’on sait, c’est que cette mutation n’est pas dangereuse, bien qu’elle se traduit par une augmentation de la contagiosité. Ces deux points n’interfèrent pas foncièrement avec l’enfant”, souligne le spécialiste.
Les enfants présentent peu de risque d’être infectés par le Covid-19, et, lorsqu’ils le sont, leurs symptômes sont généralement très légers. “Le récepteur ACE-2, qui permet l’entrée du virus au niveau de l’épithélium nasal, est beaucoup moins présent chez les enfants”, explique Ahmed Aziz Bousfiha. D’après les premières recherches internationales sur cette nouvelle souche, la hausse d’infectiosité s’explique par son efficacité à trouver et s’accrocher au récepteur ACE-2, d’où la légère hausse pour les enfants.
Mais le système immunitaire des plus jeunes reste ce qu’il est et est perpétuellement en “apprentissage”. “Les enfants connaissent beaucoup d’infections en bas âge, c’est un peu ce qu’on peut appeler l’apprentissage immunitaire, qui se fait par plusieurs virus, dont les coronavirus. Ce qui leur permet de développer une immunité croisée”, poursuit le spécialiste. Des facteurs qui s’ajoutent à l’important carnet de vaccination, de leur deux à six ans, allant de la coqueluche à la tuberculose, qui permet “au système immunitaire d’être éveillé et de se battre”, ajoute-t-il.
Ailleurs, les écoles ferment leurs portes
Cette nouvelle souche, en circulation depuis septembre, avait provoqué un fort sentiment d’inquiétude outre-Manche. Notamment depuis qu’une infirmière en chef de l’hôpital de Londres, Laura Duffel, évoquait une situation “effrayante”, le 1er janvier, dans un extrait sonore partagé par la BBC. “Le Covid affectait très peu les enfants dans la première vague, mais nous avons toute une salle d’enfants ici et je sais que certains de mes collègues sont dans la même situation”, indiquait-elle.
🗣️ « It was minimally affecting children in the first wave… we now have a whole ward of children here. »
Laura Duffel, a matron in a London Hospital, tells Adrian Chiles about the Covid situation in hospitals.
📻 @BBCSounds pic.twitter.com/2BwYOJvov5
— BBC Radio 5 Live (@bbc5live) January 1, 2021
Une sortie largement relayée sur les réseaux sociaux. Dans la foulée, le président du Collège royal de la pédiatrie et de la santé infantile (RCPCH) et quatre autres experts réagissaient dans un communiqué : “Il est important d’indiquer clairement que nous ne voyons pas une vague nationale de maladies induites par le Covid-19 chez les enfants.”
Reste que face à la recrudescence de cas de Covid-19 et à la propagation du variant britannique, plusieurs pays européens ont fermé leurs écoles à l’instar de l’Allemagne, de l’Écosse ou encore de l’Autriche. Une fermeture des établissements scolaires est-elle pour autant envisagée au Maroc ? “Pour l’instant non”, écarte notre interlocuteur au ministère de l’Éducation : “On ne fait que suivre les recommandations du comité scientifique national.”