Très attendue, la publication de ce rapport conjoint des experts de l’OMS et de Chine, dont les conclusions n’ont pas créé la surprise, intervient quinze mois après l’apparition des premiers cas de Covid-19 fin décembre 2019 à Wuhan. La pandémie a fait depuis au moins 2,7 millions de morts dans le monde, et ravagé l’économie mondiale. Alors que la croissance des cas — dopée par des variants plus contagieux et peut-être plus mortels — continue sa terrible progression malgré la course à la vaccination, les pays alternent les phases de confinement et déconfinement.
S’il ne résout pas le mystère des origines du SARS-CoV-2 (le virus qui provoque le Covid-19), le rapport, dont l’AFP a obtenu une copie, souligne la nécessité de réaliser d’autres études en Chine et ailleurs, jugeant la transmission à l’homme du virus par un animal intermédiaire “probable à très probable”, tandis que l’hypothèse d’un incident de laboratoire reste “extrêmement improbable”.
Accusations de complaisance
Cela confirme les premières conclusions des experts présentées lors d’une conférence de presse le 9 février à Wuhan, l’agglomération chinoise considérée comme l’épicentre de la maladie.
Les experts ont été autorisés à mener l’enquête sur le terrain seulement un an après le début de l’épidémie par les autorités chinoises, du 14 janvier au 9 février
Ces conclusions ne manqueront pas de faire rejaillir les accusations de complaisance de l’OMS à l’égard de la Chine, certains estimant notamment que la douzaine de spécialistes internationaux a manqué de latitude pour travailler librement lors de son séjour de quatre semaines dans la ville chinoise en janvier et février.
La mission sur les origines de la transmission du virus à l’homme, jugée extrêmement importante pour tenter de mieux lutter contre une possible prochaine épidémie, a eu du mal à se mettre en place, la Chine semblant très réticente à laisser venir ces spécialistes mondiaux de diverses disciplines comme l’épidémiologie ou la zoologie.
Les experts ont été autorisés à mener l’enquête sur le terrain seulement un an après le début de l’épidémie par les autorités chinoises, du 14 janvier au 9 février.
Viande surgelée, une autre hypothèse ?
Le rapport privilégie la théorie généralement admise de la transmission naturelle du virus d’un animal réservoir — probablement la chauve-souris — à l’homme, par l’intermédiaire d’un autre animal qui n’a pas encore été identifié.
La transmission directe du virus via l’animal réservoir est toutefois jugée “possible à probable” par les experts. Ils n’écartent par ailleurs pas l’hypothèse d’une transmission par de la viande surgelée — piste privilégiée par Pékin — jugeant que ce scénario est “possible”.
Le rapport recommande de poursuivre des études sur la base de ces trois hypothèses, mais il balaie en revanche la possibilité que le virus ait été transmis à l’homme en raison d’un accident de laboratoire.
Dans leur rapport, les experts indiquent ne pas avoir étudié le cas d’une fuite volontaire, et jugent “extrêmement improbable” un accident
L’administration de l’ancien président américain Donald Trump avait accusé l’Institut de virologie de Wuhan, qui mène des recherches sur des pathogènes très dangereux, d’avoir laissé s’échapper le coronavirus, volontairement ou non. Dans leur rapport, les experts indiquent ne pas avoir étudié le cas d’une fuite volontaire, et jugent “extrêmement improbable” un accident.
Dans ses conclusions, le rapport indique que les études de la chaîne d’approvisionnement du marché de Huanan (et d’autres marchés de Wuhan) n’ont pas permis de trouver “des éléments de preuves de la présence d’animaux infectés, mais l’analyse des chaînes d’approvisionnement a fourni des informations” utiles pour des études de suivi ciblées, notamment dans des régions voisines.
Les experts appellent également à “ne pas négliger les produits d’origine animale provenant de régions situées en dehors de l’Asie du Sud-est”. Et de conclure : “Les enquêtes doivent être conçues (…) dans des zones plus vastes et dans un plus grand nombre de pays.” L’OMS a prévenu qu’il faudra s’armer de patience avant de trouver une éventuelle réponse.
La mission est née d’une résolution adoptée le 19 mai 2020 par les membres de l’OMS qui lui demandait “d’identifier la source zoonotique du virus et de déterminer par quelle voie il s’est introduit dans la population humaine, (…) notamment moyennant des missions scientifiques et des missions de collaboration sur le terrain”.