L’Agence nationale de réglementation des télécoms (ANRT) vient de signer la fin du monopole de l’opérateur historique sur le segment de l’ADSL. L’agence de régulation a donné raison à Inwi (voir encadré) et sommé Maroc Telecom de lui offrir, comme à tout opérateur voulant se lancer sur ce marché, l’accès à ses infrastructures dans de meilleures conditions. Initialement prévu pour 2013, le lancement d’Inwi sur le marché ADSL a été reporté suite à ses déboires avec l’opérateur historique. Aujourd’hui que l’ANRT s’en est mêlée, plus rien n’empêche la filiale de la SNI de lancer sa propre offre.
« Inwi est fermement déterminée à lancer son ADSL d’ici la fin de l’année », annonce Frédéric Debord, directeur général de l’entreprise. Un lancement prévu pour novembre prochain et étudié depuis plusieurs années. En décembre 2013 déjà, Rachid Sefrioui, directeur réglementation d’Inwi, expliquait dans les colonnes de L’Economiste que l’entreprise se préparait depuis deux ans « à lancer un service alternatif à l’opérateur historique sur l’ADSL ». Tous les investissements en équipements réseau, systèmes d’information et recrutements ont déjà été réalisés. Néanmoins, la date avancée par le management reste « un objectif », car tout dépend encore de Maroc Telecom. « Il faut attendre les délais et conditions de déploiement de la décision de l’ANRT », explique Frédéric Debord. Si l’offre Inwi est déjà ficelée, elle connaitra quelques ajustements quand les modalités et tarifs de dégroupage (ndlr : opération technique permettant l’ouverture du réseau téléphonique local à la concurrence) seront connus. Car rien n’empêche l’opérateur historique de contester la décision de l’ANRT et de porter l’affaire devant le tribunal administratif. Une démarche qui pourrait retarder l’échéance de l’application de la décision de l’ANRT, mais qui ne l’annulera pas, de l’avis des experts.
Le consommateur, grand gagnant
Cette guéguerre finira tôt ou tard par aboutir au lancement de nouvelles offres, pour le plus grand bonheur des abonnés. L’avènement de la concurrence dans un marché longtemps dominé par un seul opérateur permettra en effet de généraliser l’ADSL, d’améliorer la qualité des services et de faire baisser les prix. « Le dégroupage est un droit du consommateur », avance un expert du secteur. Même si l’ADSL a enregistré une hausse de 6,09% au cours du premier trimestre de l’année 2014, sa pénétration reste faible par rapport à la 3G. L’ADSL ne représente que 13,88% du parc Internet, contre 86,09% pour la 3G. Cela s’explique par les tarifs d’abonnement, jugés trop chers. Un prix auquel il faut ajouter un forfait de ligne fixe, sans laquelle il est impossible d’accéder à l’ADSL. Quoi de plus normal quand un opérateur domine le marché ?
A titre indicatif, les prix pratiqués par Maroc Telecom (affichés sur son site Web) pour l’ADSL vont actuellement de 99 dirhams pour un débit de 4 Mo à 499 dirhams pour 20 Mo. Encore faut-il disposer de ces mêmes débits pour lesquels les clients paient le prix fort. Comme remarque, Maroc Telecom précise sur son site Internet que « ces débits sont théoriques et peuvent être atteints dans des conditions d’utilisation optimales ». Mais dans la pratique, ces conditions optimales sont rarement observées et le consommateur n’a aucun moyen de vérifier qu’il dispose vraiment du débit qu’il a acheté. D’ailleurs, les multiples plaintes et attaques que subit l’opérateur historique sur les réseaux sociaux à ce sujet prouvent que le service est loin d’être au point. Inwi fera-t-il mieux que son concurrent ? C’est ce qu’espère le consommateur marocain et ce que promet en substance la filiale de SNI. Déjà en termes de prix, le management laisse sous-entendre une tarification plus attrayante que celle pratiquée actuellement. Il faudrait également s’attendre à ce qu’Inwi propose, comme à son habitude, quelques innovations, à l’image de ce qu’elle a fait avec le mobile. Le troisième opérateur télécoms s’est fortement positionné sur le contenu (photos, vidéos, TV, etc.), qui est l’avenir des télécoms. Rien ne l’empêcherait donc de proposer des offres dans ce sens. En revanche, s’agissant du service après-vente, il restera, selon nos informations, dans le giron de l’opérateur historique. Au grand dam d’Inwi, car rien n’empêcherait IAM de mieux servir ses clients et plus rapidement que ceux de la concurrence.
Internet. L’ANRT s’en mêle !
En décembre 2013, Inwi a saisi l’autorité de régulation, l’ANRT, sur un litige qui l’oppose à Maroc Telecom au sujet de l’ADSL. La filiale de la SNI estimait que l’opérateur historique ne lui proposait pas des conditions de concurrence normale lui permettant de lancer son offre ADSL. Il y a quelques jours, l’ANRT a finalement rendu publique sa décision, donnant raison à Inwi. « Cette décision apporte une bonne réponse au problème du dégroupage au Maroc », se félicite Frédéric Debord. Pour lui, elle « ouvre la voie au partage des infrastructures et à leur régulation conformément aux standards internationaux ». Ainsi, l’opérateur historique est appelé à soumettre à l’approbation de l’ANRT, dans un délai franc de 45 jours, une offre technique et tarifaire d’accès à son réseau ADSL. Les tarifs des différentes prestations relatives à l’offre doivent être orientés vers les coûts et être dûment justifiés par IAM. Cette dernière est également appelée à mettre à la disposition des opérateurs tiers, comprenez Inwi et Méditel, une solution alternative pour permettre la colocalisation des équipements desdits opérateurs au niveau des nouveaux nœuds de raccordement d’abonnés (NNRA) actuellement déployés par IAM. Dans le cas où l’opérateur historique ne soumet pas à l’ANRT lesdites offres dans les délais prévus, l’Agence fixera elle même les modalités techniques et tarifaires.
« 99 dirhams pour un débit de 4 Mo à 499 dirhams pour 20 Mo ».
« Mb/s » (Mégabit/seconde), et non pas « Mo »