Salut à vous, les amis. Vous pouvez vous détendre, Zakaria Boualem est là, souple sur ses appuis, déterminé à rapporter les détails de la construction du Maroc Moderne grâce à la commission penchée qu’il constitue à lui seul. Le bougre vient d’apprendre que de nouvelles élections se profilaient à l’horizon. Vous le connaissez, cette perspective l’inquiète un peu, puisque ce beau moment de la vie démocratique s’accompagne chez nous d’une production d’absurde impossible à encaisser sans vaciller. D’ailleurs, le Boualem trouve qu’on vote beaucoup chez nous, surtout qu’on ne décide de pas grand-chose, en fin de compte.
Profitons donc des derniers instants paisibles avant l’avalanche de slogans vides et de logos laids. Car oui, nous traversons une bonne période, c’est incontestable. Nous travaillons avec sérieux et application. Nous sommes concentrés et prenons le temps qu’il faut pour atteindre nos objectifs, c’est une attitude admirable. Vous voulez un exemple ? Voici celui du complexe Moulay Abdellah, un stade de football. Il a été fermé pendant de longs mois fin 2014 pour préparer la Coupe du monde des clubs, un événement au cours duquel il a sombré corps et âme devant les caméras du monde entier. Fermé à nouveau pour réparer cette avarie, il a ouvert en avril 2016, avant de se retrouver de nouveau fermé cette semaine pour réparer la pelouse. Un bel exemple d’abnégation, qui traduit à la perfection notre exigence de qualité. Mais il y a d’autres exemples : cette attitude est générale hamdoullah. Observez, par exemple, cet organisme officiel chargé des études pour le détroit. Oui, il existe, et il doit nous dire s’il faut construire un tunnel, un pont ou une série de catapultes entre l’Espagne et nous. Sur son site officiel, il annonce une phase de diagnostic menée entre 1980 et 1982, une phase de préfaisabilité conclue en 1988, logiquement suivie par une étude de faisabilité achevée en 2001, avant de se lancer, entre 2001 et 2007, dans une mise à jour des données liées au trafic. Cette passion de la planification force le respect. Comme je vous sens sceptique, voici un dernier exemple, fourni par l’Unesco, qui nous annonce qu’en termes d’éducation, “le Maroc n’atteindra ses objectifs que dans un siècle”.
Qu’y a-t-il de plus noble, je vous le demande, qu’un pays qui pense aux enfants du siècle à venir ? Certes, Zakaria Boualem le sait, ce type d’exemple peut être détourné par les esprits grincheux. Ils geignent, se plaignent et ne proposent jamais rien. Ils vous expliqueront sans vergogne que tout cela est très long, que ce stade est fermé plus souvent qu’il n’est ouvert, que ce tunnel avec l’Espagne a mis plus de temps à voir le jour que la pyramide de Kheops, et que nos écoles, en attendant le nouveau siècle, vont produire une quantité d’analphabètes capable de plonger un pays comme le Japon dans les ténèbres. Ne les écoutez pas, leur seul objectif est de dégrader l’image du pays. Il faut, au contraire, attendre. Laisser les gens travailler, leur faire confiance, sans entraver leur action en leur demandant des comptes, profiter de la stabilité dans laquelle nous baignons et de notre statut de “pays qui s’en sort le mieux dans la région”. Si vous vous ennuyez, vous pouvez faire comme cette armée de citoyens qui s’est mis en tête de parcourir le pays, smartphone à la main, pour traquer la taille des jupes de nos filles ou les turpitudes sexuelles de nos hommes de foi. Vous pouvez aussi vous coller le nez à un écran et commenter à l’infini le néant qui se déverse dessus. C’est distrayant, croyez-moi. Et attendre, donc. Les vacances, le ramadan, l’aïd le petit et le grand, les élections, ou la reprise de la Botola. C’est ce que Zakaria Boualem va faire d’ailleurs.
Voilà, c’est tout, et merci.