Bourita gonflé à bloc face à son homologue des Pays-Bas

Nouvel épisode de tension entre le Maroc et les Pays-Bas sur la question du Rif. Les ministres des Affaires étrangères des deux pays se sont rencontrés à New York le 28 septembre, « lors d’une réunion houleuse ».

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Nasser Bourita et le ministre néerlandais des Affaires étra Stef Blok le 28 septembre à New York Crédit: MAECI / Facebook

Ca ne s’arrange pas entre les ministres des Affaires étrangères du Maroc et des Pays-Bas. Nasser Bourita et Stef Blok se sont vus le 28 septembre à New York, en marge de l’Assemblée générale des Nations unies. Le ministère marocain rend compte de cette réunion de manière peu commune, la qualifiant de « houleuse ». Le ministère hollandais, en revanche, ne relate pas de cette rencontre via ses canaux de communication habituels et s’abstient de « commenter les affaires bilatérales ».

A l’occasion « Nasser Bourita a réitéré le rejet catégorique des propos, des actions et des interférences des Pays-Bas au sujet des événements dans le Rif, » explique néanmoins le ministère marocain.

Le Maroc considère notamment comme une « interférence », un rapport sur le Hirak rifain, ou « missive » selon les sources, que Stef Blok a transmis le 5 septembre à la commission des Affaires étrangères du parlement néerlandais.

Dans ce document, le responsable néerlandais qualifie les peines de prison prononcées à l’encontre des militants du Hirak d’« inquiétantes », indique le quotidien néerlandais De Telegraaf.  Le chef de la diplomatie néerlandaise fait en outre valoir que son pays était le seul pays européen à assurer le suivi des auditions des 53 détenus du Hirak à Casablanca, nous indiquait une source diplomatique marocaine, considérant ce suivi comme une forme de « surveillance ». En réponse à ce rapport, Nasser Bourita avait convoqué le 7 septembre, l’ambassadrice néerlandaise à Rabat Désirée Bonis.

Le 28 septembre à New York, Nasser Bourita a remis  « une lettre de réponse relative au rapport de Stef Block adressé au parlement néerlandais ».

« Nasser Bourita a souligné que cet acte ne saurait être accepté par le Royaume du Maroc, et qu’il constitue une prise de position négative flagrante à l’endroit du Royaume et qu’il comporte des contrevérités certaines, des termes inadaptés, des appréciations erronées des faits et des réflexions inappropriées, » poursuit le ministère marocain.

« Nasser Bourita a dénoncé la singularité de cette démarche, aussi bien dans la forme que dans le contenu, martelant qu’elle tranche nettement avec les règles de respect mutuel entre Etats souverains et va à l’encontre de l’esprit de coopération entre deux pays dans plusieurs domaines, » ajoute encore le communiqué qui indique que Bourita a réaffirmé que « le Maroc n’a de leçon à recevoir de personne. »

Une série de rencontres houleuses

Nasser Bourita avait déjà prononcé cette même phrase, en conférence de presse le 20 avril, à l’issue de sa rencontre avec le même Stef Block, à Rabat.

Selon nos informations, le dossier du Rif avait en effet été abordé par le ministre néerlandais des Affaires étrangères qui n’avait pas eu gain de cause sur un autre sujet, celui de la protection sociale des Marocains résidant aux Pays-Bas. Selon le ministère chargé des MRE, 460.000 Marocains – dont une majorité originaires du Rif – résidaient aux Pays-Bas en 2015, soit près de 3 % de la population du pays.

Selon nos informations, la passe d’armes entre Bourita et Blok n’avait duré ce jour-là que quelques minutes.

Sur les manifestations d’Al Hoceima et de sa région, Nasser Bourita avait alors affirmé qu’ « il s’agit d’une affaire interne, qui n’est pas une question diplomatique, qui ne peut en aucun cas faire l’objet de discussion, ni d’interaction avec des pays étrangers. »

Lors de cette même rencontre d’avril, Stef Blok et Nasser Bourita avaient également évoqué le cas de Saïd Chaou. Ancien député du PAM, fondateur du Mouvement du 18 septembre pour l’indépendance du Rif (M18S), le Maroc entend juger Saïd Chaou dans le cadre de l’affaire Najib Zaimi. Ce dernier, arrêté en 2010 par les autorités marocaines, avait été reconnu coupable de « trafic de drogue à l’échelle internationale, torture et blanchiment d’argent » et avait désigné Saïd Chaou comme « associé » .

L’extradition du Maroco-Néerlandais, cousin d’Ilyas El Omari, a été au cœur de tensions diplomatiques entre les deux royaumes. Le Maroc avait rappelé, en juin 2017, son ambassadeur aux Pays-Bas après deux mois d’échanges avec les autorités néerlandaises concernant l’extradition.

Cinq jours plus tard, l’ancien parlementaire avait été arrêté aux Pays-Bas le 29 juin, suite à une « demande d’arrestation et d’extradition » formulée par le Maroc auprès des autorités néerlandaises.

Mais le 22 février 2018, la Cour de Breda estimait que les garanties présentées par le Maroc « ne sont pas suffisantes et ne permettent pas d’écarter le danger d’un procès inéquitable ». Le ministère de la Justice néerlandais et le procureur général se sont pourvus en cassation.

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