La venue du prédicateur égyptien controversé, Omar Abdelkafi, au théâtre Mohammed V de Rabat les 24 et 25 novembre pour animer des conférences sur le thème du « respect de soi » a fait l’objet d’une pétition signée par une quinzaine d’intellectuels marocains. L’objectif de cette démarche : annuler la tenue de cet événement planifié par l’association Al Joud – ayant déjà organisé des conférences avec l’islamologue Franco-Suisse Tariq Ramadan.
Parmi les premiers signataires du document baptisé « Non à la haine et à l’extrémisme », dont TelQuel détient une copie, se trouvent les écrivains Ahmed Aassid et Driss Ksikes, le militant Fouad Abdelmoumni, l’avocat Abderrahim Jamaï, ou encore le journaliste et universitaire Omar Brouksy.
Pour justifier leur action, ces derniers dénoncent les propos « extrémistes » et « misogynes » de ce prédicateur, connu dans le monde arabo-musulman pour ces interventions sur la chaîne saoudienne Iqraa qui se présente comme un « refuge pour la famille musulmane« .
Dans la pétition, il est notamment reproché à Omar Abdelkafi – suivi par plus de 370.000 internautes sur Facebook – de propager un discours attisant la « haine contre les autres religions du livre », et de tenir des propos considérés comme « discriminatoires envers la femme musulmane ».
Invitation critiquée, mais maintenue
Pour les initiateurs de la démarche, la venue de Omar Abdelkafi au théâtre Mohammed V de Rabat constitue une « atteinte à la cohésion sociale au sein des sociétés et sème la zizanie entre les citoyens et leurs États », explique à TelQuel l’écrivain et militant Ahmed Assid. Selon lui, le prédicateur est notamment connu « pour son soutien au nazisme, puisqu’il a fait l’apologie d’Adolf Hitler en prétendant que ce dernier a fait usage du coran pour motiver le peuple allemand en vue de la guerre ».
Des propos considérés comme « un démenti catégorique de l’islam ouvert et tolérant dont nous nous présentons partout comme en étant les ardents défenseurs », clament d’une même voix les signataires du document. Et de s’interroger dans ce sens : « Avons-nous besoin d’inviter dans notre pays ce chantre de l’intolérance au moment où le Maroc s’apprête à recevoir des chefs d’Etat du monde entier et à quelques mois de la visite officielle du pape François ? ».
Aussi, le collectif déplore le fait que Omar Abdelkafi soit accueilli au le théâtre Mohammed VI pour y assurer ses conférences. À l’instar de l’écrivain Driss Ksikes et de Aadel Essadaani, cofondateur de l’association Racines – en charge du partage de la pétition. « Le théâtre est le lieu de la création, de l’ouverture, de l’émerveillement, de l’interrogation, mais pas le lieu du dogme », juge Driss Ksikes. Et à Aadel Essaadani de relever « qu’il n’est pas judicieux que le seul théâtre national du Maroc refuse des pièces de théâtre, mais permette une conférence d’un prédicateur ».
Malgré le lancement de la pétition, le 21 novembre, et les quelque cent autres signataires qui se sont ralliés à la cause, l’association Al Joud a indiqué à l’AFP que l’invitation de Omar Abdelkafi était maintenue. Un membre de l’association également confié à l’agence de presse française qu’il n’y avait « rien de haineux dans les prêches de cheikh Abdelkafi ».